Quelques anecdotes...

Adepte du vélo depuis de nombreuses années, et demeurant aux confins du Jura, des Alpes et des montagnes suisses, je profite pleinement de la région et des cols.

Ayant commencé ma randonnée seul, j’ai été vite rejoint par un bon ami cyclo : Michel. Notre travail nous permet d’avoir sensiblement les mêmes horaires et il est bien rare que l’on ne sorte pas ensemble. J’ai de bons souvenirs de ces randonnées, de la beauté du paysage, de la bonne camaraderie entre nous et des gags que mon ami a pu nous faire vivre, involontairement ! En voici quelques échantillons...

 

Nous étions dans le Jura Suisse, 11 cols à franchir en 3 jours, avec un circuit que nous avions établi. Pour le bon déroulement de la randonnée, nous laissons la voiture à un point "x" et prenons le train jusqu’à un point "y", afin de nous épargner de fastidieux retours sur une grande route (en Suisse, même les trains régionaux sont équipés de compartiments avec crochets pour les vélos).

Parés pour prendre le train avec nos vélos, sacs à dos légers, casques et bidons. Nous accrochons nos bicyclettes dans le compartiment réservé, et venons prendre place dans le wagon. Michel enlève son sac à dos, le met dans le filet ainsi que son casque avec le bidon dedans. Il s’assoit à côté d’un papy endimanché qui fait face à son épouse (elle aussi endimanchée). Moi, j’occupe un siège de l’autre côté de l’allée.

Chemin de fer faisant, je remarque que la dame regarde bizarrement son mari. Ses yeux s’agrandissent de plus en plus, en voyant la belle veste du monsieur se tacher méticuleusement au gré des cahots du train. Je réagis et avertis discrètement Michel. Avec les secousses, son bidon avait chaviré dans le casque, et du bouchon s’échappait le précieux liquide (sucré et acidifié). La dame s’en aperçoit et, en bonne suisse allemande, nous arrose copieusement de son dialecte, alors que son mari s’interroge sur l’étanchéité des wagons suisses.

Nous voici partis pour le Tessin par les grands cols : Nufenen, St-Gothard, Lukmanier, Monte Ceneri pour faire étape à Lugano.

Nous trouvons facilement un hôtel. Belle vieille bâtisse, accueil chaleureux. Et l’on demande pour ranger les vélos. La réceptionniste nous offre deux places à la cave. La descente de la cave, c’est un peu le Galibier, mais avec un seul virage. Vertigineux ! Les marches sont en granit. Prudemment, j’enlève mes chaussures. Michel, casqué, sac à dos, vélo sur l’épaule, entame directement la descente. Il fait 3 marches, moi une en chaussettes, et voilà, pour lui, une longue dégringolade qui commence. Les cales plastiques, sur le granit, font office de patins à glace. Il tombe assis sur la quatrième marche et dévale le reste de l’escalier sans lâcher le vélo. Arrivé au virage, il se bloque à l’extérieur et là, le vélo, qui avait pris un peu de retard, vient lui taper sur le casque et l’on voit qu’il accuse le coup. Quelle chute !

La réceptionniste, qui était restée avec moi en haut de l’escalier, me regarde, à la fois défaite et amusée. Moi, je ne sais pas si je dois rire ou pleurer. Elle me demande : "Vous croyez qu’il s’est fait mal ? " (Michel est en bas et ne bouge plus). Et moi de lui répondre : "Oh ! Vous savez, c’est une chance, il n’enlève jamais son casque..." Cela a dû le réveiller, il s’est tourné vers nous et a dit : "Attention ! L’escalier est pentu..."

Départ pour la Suisse profonde dans les cantons fondateurs de la Confédération. Nous sommes de bons touristes et essayons de nous adapter aux rites et coutumes du pays. Cette fois en l’occurrence, Michel a décidé de mettre son allemand scolaire en pratique. Ce matin-là, dans la petite ville de départ, nous sommes un peu perdus et avons du mal à nous orienter. L’interprète va œuvrer !

Par chance, un piéton nous regarde. Michel, dans la belle langue de Goethe, le hèle : "Bittesehoen, Danke schoen, Wir wollen..." J’en passe et des moins bonnes. Michel gesticule, grandes explications, faut-il aller à droite, à gauche, tout droit ? La personne n’a pas l’air de bien comprendre. Michel réitère sa demande, avec moult gestes et dans un allemand, (pour moi qui ne le comprends pas), irréprochable. Le quidam le regarde, me regarde bizarrement, et là, à notre grande stupéfaction, dans un français plus que correct, dit : "Vous allez jusqu’au feu rouge, puis à gauche, tout droit, et après 100 m, première à gauche !" ... Pour nous, Français, les langues sont quand même un écueil !

Et je ne vous parle pas du jour où nous avons gravi le Stelvio et où Michel, à cause d’une blessure à la selle, est entré dans une pharmacie de Bormio pour demander du mercurochrome en implorant le ciel que la préparatrice ne comprenne pas qu’il voulait des préservatifs...

C’est un plaisir toujours renouvelé de faire des kilomètres avec Michel. La prochaine fois, je vous parlerai de ses ennuis avec la mécanique.

 

Christian LEROUX, N° 4704, de DIVONNE-LES-BAINS (Ain)