MONUMENTS  ROMANS

 

A CORNILLON-SUR-L'OULE au sud de La Motte-Chalancon, au nord de R�muzat couronnant un roc aux parois abruptes surplombant de pr�s de 250 m la boucle de l'Oule qui le cerne sur trois c�t�s, le ch�teau de Cornillon est un �difice impressionnant qui n'est pas sans rappeler certaines fortifications de Terre Sainte.  Construit autour d'une �glise sans doute pr�existante, dont subsistent le cul-de-four de l'abside et les naissances du berceau de la nef, le fort comporte toute une s�rie d'enceintes conserv�es sur une belle �l�vation.  La plate-forme sommitale (50 m sur 30 m), d'o� s'offre une vue imprenable tout � l'entour et en particulier sur le cirque de La Motte, conserve les vestiges du ch�teau proprement dit (trois salles rectangulaires et une citerne).  Les parements des murailles sont en moellons de calcaire, les cha�nages d'angle et les encadrements de meurtri�res en moyen appareil � joints fins, avec, ici et l� (vo�tes, linteaux), l'emploi de tuf.  Au total, un ensemble spectaculaire de la seconde moiti� du XIII�me si�cle, qui m�riterait �tude et mise en valeur.

A VESC situ�e en bas d�un pittoresque village m�di�val encore bien vivant malgr� son isolement, entour�e d'un cimeti�re, l'�glise Saint-Pierre est celle d'un prieur� relevant de l'abbaye de Cruas en Vivarais.  De l'�difice roman, il ne reste que la nef et la fa�ade occidentale : une nef de trois trav�es, rythm�e � l'int�rieur par des colonnes faiblement engag�es dans les pilastres et laissant appara�tre, � l'ext�rieur, dans la fa�ade m�ridionale, les arrachements des contreforts et les deux baies en plein cintre, aujourd'hui obtur�es, qui �clairaient les deuxi�me et troisi�me trav�es, la premi�re, plus longue, restant aveugle.  Ce m�me mur Sud montre bien aussi que la construction de l'�difice s'est d�velopp�e � la fois d'Est en Ouest mais aussi, par �tapes, de bas en haut : en effet, alors que le moyen appareil en calcaire paremente la partie basse de toute la nef et la totalit� de l'�l�vation de la troisi�me trav�e, les parties hautes des deux premi�res trav�es sont mont�es - du fait d'un arr�t du chantier, d'un changement d'entreprise ou d'un approvisionnement aupr�s d'une nouvelle carri�re - dans un gr�s roux bien diff�rent du mat�riau utilis� pour le reste du monument.  La fa�ade occidentale est la partie la plus remarquable de l'�difice, avec son portail en plein cintre form� de deux voussures s�par�es par un tore retombant sur deux colonnettes � chapiteaux ornementaux, aux motifs archa�sants, l'archivolte �tant d�cor�e de dents d'engrenage et d'une mouluration qui s'amortit sur deux consoles, celle de droite pr�sentant un couple de t�tes humaines (les donateurs ?).  L'un des tailloirs est orn� d'entrelacs et la corbeille des chapiteaux couverte de feuillages stylis�s, de faible relief mais soigneusement cisel�s, aux ar�tes vives et, de ce fait, accrochant bien la lumi�re : � n'en pas douter il s'agit l� de sculptures sortant de l'atelier auquel on doit la d�coration de la tribune de Cruas (Vivarais).  On observera enfin, ici et l�, dans les fa�ades, de nombreux remplois romans : des fragments de reliefs ornementaux dans le mur Sud, des tailles d�coratives et des marques de t�cherons (A) dans la fa�ade Ouest et, dans le mur Nord, dont le parement a �t� remont�, des claveaux num�rot�s (I, III) et des marques de t�cherons : BA, G, N, R, W. Toutes ces caract�ristiques permettent de situer la construction de ce prieur� particuli�rement attachant vers le milieu du XII�me si�cle.

L��glise Saint-Jean-Baptiste de Crupies, �tablie sur un site gallo-romain au-dessus du cours du Roubion, appara�t dans les textes en 1107, mais son origine est bien plus ancienne (peut-�tre �tait-ce une �glise baptismale), comme le prouvent les fragments remploy�s au-dessus de la porte : y sont sculpt�s en m�plat des rameaux de vigne, aux feuilles tr�s d�coup�es, que picore un oiseau, travail pr�roman, voire pr�-carolingien.  �glise d�pendant du prieur� de Bourdeaux, lui-m�me d�pendant de l'abbaye b�n�dictine de Savigny, pr�s de l'Arbresle (Rh�ne), l'�difice �tait en ruines apr�s les guerres de religion.  Rempla�ant aux XVIle et XVIlle si�cles l'�glise Sainte-Catherine du village perch� de la Vialle, il fut transform� en temple protestant de 1806 � 1904, d�saffect�, puis restaur� en 1960.

La nef unique comprend deux trav�es, dont les murs sont renforc�s d'arcs de d�charge en plein-cintre.  Les impostes qui re�oivent ces derniers sont form�es de deux cavets superpos�s ou d'un cavet surmont� d'un tore, moulures peu fr�quentes dans le voisinage.  A l'�poque classique, on a fait dispara�tre un dosseret aux pilastres, reb�ti la vo�te et la fa�ade, ouvert de grandes fen�tres.  Le petit appareil en moellons de gr�s roux des murs gouttereaux de la nef contraste avec les assises plus minces, o� se m�lent des moellons calcaires romains, de la partie orientale de l'�difice : le raccord se voit bien dehors � la seconde trav�e, au sud. Le contraste appara�t tout aussi net � l'int�rieur, quand on arrive � la trav�e de ch�ur, vaste et insolite, d�pourvue d'arcs de d�charge. Deux hauts pilastres, dispos�s l�g�rement en oblique pour bien correspondre aux contreforts et portant des tailles d�coratives, marquent l'entr�e de la trav�e. Comme ceux de l'abside, ils sont surmont�s d'une imposte que d�core, seul luxe de l'�difice, une frise de deux ou trois spirales, auxquelles peut s'en ajouter une demie. Le motif, d�riv� du rinceau, se rencontre � l'�poque carolingienne et deux des frises conservent, entre des spirales, le souvenir d�form� d'une petite feuille dont la signification n'�tait plus per�ue. Dans l'h�micycle de l'abside, frappante elle aussi par sa nudit�, se remarque une assise de moellons compl�t�s par des briques. Au sud s'ouvre dans la trav�e une porte ancienne, contigu� � l'un des contreforts tr�s massifs, construits en partie avec le m�me appareil que l'�difice, ce qui prouve que celui-ci �tait vo�t� d�s le d�but.

Trav�e et abside paraissent contemporaines, ou peu s'en faut, de l'installation des moines de Savigny dans plusieurs �glises autour de Comps, et en particulier � Bourdeaux, � partir de 1031. La simplicit� des structures, le d�gagement des volumes d� � la nudit� des parois, l'emploi du petit appareil, l'arch�sme de la d�coration ne d�mentent pas cette datation ; le motif des spirales se retrouve en remploi � Comps. Quant � la nef, avec sa mod�nature, elle para�t remonter au Xlle si�cle.

Petite �glise peu connue, Saint-Etienne de Montjoux m�rite le d�tour. Son site, au pied de la Lance qui s�pare de la Provence, est celui d'un village m�di�val dont il reste quelques belles maisons, � port�e de vue du ch�teau renaissance des seigneurs de Vesc de Montjoux. Ce prieur� s�culier avait droit � la d�me.

Vraisemblablement construite au d�but du XIIIe si�cle au hameau du p�age de la seigneurie de Montjoux, Saint-Etienne est compos�e d'une abside semi-circulaire ouvrant sur une nef unique. A cet ensemble roman, recouvert � l'int�rieur de peintures du XIXe si�cle, a �t� accol� tardivement un pr�au charpent� prolongeant la nef, sorte de vestibule que l'on voit souvent dans les chapelles proven�ales ne pr�sentant pas de portail sud.  Une sacristie est �galement adjointe, au sud de l'abside. Saint-Etienne �tait entour�e d'un cimeti�re, dans lequel des sarcophages ont �t� retrouv�s.

Le vo�tement de la nef a �t� largement repris, il repose sur des corniches et arcs de d�charge romans. Les deux impostes des piles de l'abside sont orn�es de motifs � enroulements archa�sants, encro�t�s par un lait de chaux. Les fen�tres ont �t� reprises � l'ext�rieur, mais elles occupent l'emplacement des ouvertures romanes, notamment celle de l'abside, dont l'appareil roman est assez irr�gulier.

Terre des comtes de Diois et de Valentinois, le fief de Montjoux appartint tr�s t�t � la famille des Vesc. Hugonin de Vesc, seigneur de Montjoux d�s 1170 par son mariage avec Doucine Alleman dame de la B�tie-Rolland, se croisa en 1180. Il est curieux de noter que les impostes de Montjoux sont, dans leur facture, assez semblables � certains �l�ments de Saint-Paul de Comps, Saint-Jean de Crupies, voire Saint-Jean-des-Commandeurs du Po�t-Laval. Tous ces �difices faisaient partie, d'une mani�re ou d'une autre, des terres de la famille des Comps dont deux membres furent commandeurs de l'ordre des Hospitaliers de Saint-Jean de J�rusalem au Po�t-Laval, famille �tomb�e en quenouille� dans les Vesc.  Ult�rieurement, alors que certains des Vesc avaient embrass� la R�forme et entra�n� une partie des habitants de leurs terres, un bourg protestant se cr�a � La Paillette, autour d'un temple.

 

�TYMOLOGIE

Nous sommes dans la Dr�me, rivi�re rapide au r�gime quasi torrentiel (donc plut�t calme en �t�), issu du grec dromos : action de courir, course rapide.

Michel de Br�bisson (juin 2001)