Pourquoi courir sur les grands routes, à la recherche de je ne sais quel «chrono du siècle» qui ne sera que ridicule vu nos possibilités ? Pourquoi ne pas sortir des routes «battues» et aller sur les sentiers à la rencontre ? Rencontre surprise... L'écureuil ou le chasseur, la vache ou le pigeonnier... Quittons donc cette infecte RN 508 où l'on se sent trop vocation de hérisson, et grimpons vers le col de l'Epine. C'est déjà mieux, mais encore trop connu. Optons carrément pour la première (qui sait !). Au col, nous prenons à droite de la route la «barrotière » pentue qui monte à Ville de Rosset, nom pompeux pour un méchant hameau, ville fantôme de la «Hiaute» où gisent quelques carcasses de diligences de tôle mangées par les orties. D'après l'antiquité qui nous sert de carte, ce chemin est le seul qui mène au col du Fer, petite dépression coincée contre la chaîne du Charvin. Jusqu'à peu, l'endroit était dépourvu d'intérêt pour nous, mais dès que j'y pus accoler l'appellation magique, il devint soudain impératif d'y porter nos roues, sans prendre garde à la saison, peut être pas aussi avancée qu'il le faudrait... Sur la crête boisée, le chemin coupe au plus court, donc au moins cyclable, et nous cheminons non pas à côté de nos pompes mais de nos vélos (ce qui, pour un observateur étranger, revient au même. Allez lui faire comprendre le plaisir éprouvé à s'encombrer d'un vélo au fond des bois !). Vincent comprend d'ailleurs assez mal et se lasse vite de ces marches. Il préfère remonter sur son vélo... J'élève une objection, suivie par sa roue avant... Les lois de la pente étant ce qu'elles sont, il ne tarde pas à se retourner et à tâter le moelleux de la couche de feuilles mortes. I reprend la marche en râlant contre son grand frère qui l'emmène toujours dans des endroits impossibles (et il n'a encore rien vu ! ). |
Un grondement débaroule sur nous, suivi d'une antique jeep à peine moins surprise que ses occupants. Le chauffeur nous donne l'adresse de l'asile départemental, et le chien, recouvrant ses esprits, se souvient de la vieille haine canine pour les bécaneux. Ignorant si elle est valable jusqu'au fond de la forêt, à tout hasard, il aboie. A peine plus haut apparaît la neige. Oh pas épaisse, juste de quoi remplir les baskets. D'abord ce ne sont que des traces, mais elles croissent et se multiplient jusqu'à devenir de respectables avalanches, mêlées de pierres et de branches jouant innocemment à coincer nos roues... Autre aspect désagréable de ces avalanches : elles recouvrent la route. Parce qu'une route monte au col. La carte est quelque peu faisandée, et une nouvelle fois nous avons pris le col à rebrousse poil. C'est une de nos spécialités. Là, je m'y suis pris comme un pied, il fallait monter par la Savatte... Vélo sur l'épaule et pieds dans la neige, deux dérangés débouchent au col face à la dent de Cons. Un miroir ? Content, l'acrobate de service descend sur l'avalanche. Sans les mains... Sans les pieds... Tiens, sur la tête ! Le looping n'était pas au programme, mais c'est un extra de qualité ! Le cycliste est souple, mais je me suis toujours demandé comment le vélo sortait indemne de toutes ces cabrioles. De névés en ravins, il aura tout sauté. Col du Fer : altitude 1.484 mètres. François RIEU cyclotreilliste pour quelques jours encore ! |