Du 25 avril au 7 mai, nous avons admiré la côte d'Azur et son arrière pays magnifique. Le premier col de l'année ne fut pas " Pas de la Colle " à avaler (214 m tout de même !). Il nous rappelait que très souvent les anonymes (Port de Goust, Burdin, Currutcheta...) valent amplement un Puymorens long et " raplapla ". Celui-ci vous hissera d'aventures sur les plus hautes falaises de France . De là-haut, vous dominez Cassis (BPF 13), ses calanques et la grande bleue, et vous verrez aussi les traces de la mafia marseillaise qui abandonne des épaves de voitures tous les 500 mètres ! Puis nous admirons le Parc de Saint Pons magnifiquement boisé et fleuri. Au sommet du très joli col de l'Espigoulier, trois cyclos d'Avignon nous feront un bout de route étonnés de nous voir en cyclo-campeurs pour notre...voyage de noces. Et pourtant les rubans qui flottent au vent l'attestaient !!! La Sainte Baume de Thoronet, une région agréable abîmée par la bauxite...progrès quand tu nous tiens...je n'ose plus penser à mes jantes, pédalier et autres pièces légères qui viennent peut-être de ces montagnes rouges éventrées. Le lendemain matin, un paysan inquiet de l'intérêt que nous portons à ses iris s'approche, constatant avec satisfaction que nous nous contentons de les lui prendre en photo. Il nous parle du temps changeant au printemps et ajoute : " mais aujourd'hui, il fera beau "...et chaud aurait-il dû ajouter. Nous voici dans les Maures, peuplées d'une forêt méditerranéenne typique. Là, les débroussailleuses et les moutons " nettoient " les sous-bois pour éviter une propagation trop rapide des terribles feux de forêt. Il faut savoir qu'un arbre sur deux n'atteint pas l'âge de vingt ans dans ces régions où hélas brûle, chaque année, une bonne partie de nos 30.000 hectares (Forêt d'Orléans : 35.000 Hts). Le soir, nous campons à Collobrières, capitale de délicieux marrons glacés !...et aussi d'une chorale de chenils aboyant à qui mieux mieux à la moindre voiture ! Et pourtant quel emplacement avions-nous, perchés sur une colline, à côté des ruines d'une chapelle, dominant toute la vallée et absolument seuls (hormis les échos des chiens) ; sans oublier le coucher de soleil. Le col de Babaou et la route de corniche menant à Cavalaires sur Mer vous réservent des vues magnifiques . Les alentours de St Tropez ont été massacrés par une urbanisation qui, tout en restant dans le style provençal, s'incorpore mal au paysage. Un bon point tout de même pour la cité lacustre moderne de Port Grimaud qui mérite que l'on s'y attarde une soirée de mai. Le lendemain matin, le vent nous attend, nous rappelant les dures réalité de l'aérodynamisme. Il est vrai que nous sommes dans les " rampes " du Col du Mistral ! C'est avec peine que nous rallions Fréjus et ses arènes romaines où 10.000 spectateurs pouvaient prendre place. N'oublions pas la belle cité épiscopale avec son cloître à deux étages. C'est à une vitesse de gastéropode que nous atteignons les premiers contreforts de l'Esterel. Que dire d'un massif si petit sur la carte mais si diversifié. Ne dépassant pas 618 m d'altitude au Mont Vinaigre, avec ses roches rouges déchiquetées, sa végétation en repeuplement, on se croirait facilement mille mètres plus haut. La mer blanchissant d'écume cette côte magnifique nous rappelle à la réalité, et ce qui ne gâche en rien le plaisir, une série de cols aux vues saisissantes ! La descente sur Mandelieu, vite nous glissons vers Grasse, fuyant la côte " touristisée ". Nous admirons la vallée du Loup depuis Gourdon La Sarrasine. Surprenant bourg fortifié, perché depuis le XIII ème siècle sur son éperon rocheux, dominant de plus de trois cents mètres le plancher des vaches. Gréolières. En montant en altitude, nous trouvons cerisiers et pommiers fleuris, et - à 1200m d'altitude - seuls dans un camping à la ferme - des glaçons dans la vache à eau ! La montée du col de Bleine à la fraîche avec par ci par là de petits névés, un panorama sur les cimes lointaines des Alpes du Sud enneigées...que de souvenirs. Notre première rencontre avec les " villages perchés " et les chenilles processionnaires du pin, véritable fléau introduit par le reboisement systématique en résineux (beaucoup plus rentables que les feuillus par la rapidité de leur croissance). Ces chenilles traversent les monts, les vaux et les routes par centaines, en longues files indiennes. Ecrasez la première et la machine s'arrête totalement désorientée. La file que nous avons photographiée comptait 156 individus ! La descente du col de Pinpinier nous conduit des paysages alpins à la vallée méditerranéenne en passant par la splendide clue d'AIGLUN large de quelques mètres, haute de 200 à 400 m sur 2 km. Elle permet le passage de l'Esteron. Nous avons eu du mal à imaginer que ce torrent ait pu réaliser un tel travail, coupant en deux ces montagnes calcaires ! Puis nous traversons Roquestéron, localité bâtie de part et d'autre de notre torrent. Ici jusqu'en 1860 était la frontière entre la Savoie et la France. Nous avons pu passer le pont sans difficulté. Peu après Monsieur et Madame sortant du restaurant nous regardent passer en reculant leur voiture ...dans l'unique arbre de la place ! Monsieur tenant le volant invective Madame, c'est dur d'être passagère parfois ! Ils nous ont doublés un peu après sur une petite route de montagne, ce qui nous permit d'expertiser les dégâts : un pare chocs et le coffre démolis ! Celui qui a dit que les touristes en auto ne voyaient rien s'est magistralement trompé. Sur la D 27 nous repartons en arrière, mais cette fois-ci, nous sommes bien au-dessus de la vallée. Pour ce faire, nous avons ingurgité 9 km de montée ce qui nous a permis de déjeuner à 15 h 30 ! (nous n'aimons pas faire un gros repas au pied d'un col alors...). Le soir, au désertique camping de Pujet-Thénier, nous verrons un autre type de touriste motorisé : " l'homme accroché à sa voiture ". Il y a passé toute sa soirée, portes et glaces fermées...Mais peut-être se battait-il avec sa ceinture de sécurité coincée ? |
Nous remontons les splendides Gorges du Cians toutes irisées de rayons lumineux en début de matinée. C'est la première fois que je parcourais des gorges par le fond sur toute leur longueur. Dégringolant de 1600 m en 25 km, le Cians a entaillé magnifiquement le schiste rouge . En pratique cela donne 10 km de montée entre 8 et 10 %. Nous traversons le joli village de Beuil puis nous passons le col de la Couillole. En montant un peu plus haut, les pieds dans les neiges, nous découvrons les cimes blanches du Mercantour toutes proches, ainsi que la vallée de la Thinée, vallée étroite et profonde comme dans toute cette région. Nous campons sauvage à St Jacques après avoir passé la Thinée sur une passerelle à piétons. Le soir un berger nous dit que le ciel qui s'assombrit ne s'ouvrira pas tant que le vent soufflera. C'est avec un plafond bas que nous attaquons le col de St Martin. La température est nettement inférieure à celle des jours précédents. Le sommet est dans la crasse. Mais quelle surprise dans la descente de dominer St Martin de Vésubie de si haut. On devine également les vallées alpines fermées par les montagnes blanches. Au camping de Roquebillière, nous achetons 2 kilos de miel de pays aux propriétaires très avenants. Dans la soirée la pluie arrive. Une grosse pluie. Elle tombera toute la nuit et toute la journée suivante. Nous déplantons donc grâce à la technique éprouvée " de la grenouille ", puis nous décidons de ne monter à Turini que le lendemain. Nous passons donc par les gorges de la Vésubie, le col de Chateauneuf. Quelle horreur ces montées sous les capes ruisselantes autant intérieurement qu'extérieurement ! A midi les 2 troquets du Bas-Contes nous refusant asile, nous nous abritons dans l'abri-bus du Haut-Contes. Le bus vient de passer, nous allons être tranquilles pensions-nous...C'était sans compter sans les personnes pittoresques de ce village non moins pittoresque : elles viennent attendre le bus avec une heure d'avance ! Nous allons en entendre de toutes les couleurs, en français et en patois ! " Faut être courageux pour monter de pareils engins d'un temps pareil ". " Faut être fous, vous allez attraper du mal avec cette pluie là " (en passant, seule une journée " subie " en Autriche peut battre ce qui est tombé ce jour- là). Et voilà qu'arrive Madame 100 kilos et sa fille (en bonne voie de dépasser sa mère !). Après les mêmes allusions à la folie, les recommandations (et encore heureusement que nous ne comprenons pas le patois avec lequel elles parlaient entre elles sinon...), voici le chapitre bonne volonté : " moi, j'en ferais bien du vélo, ça me ferait du bien le vélo, mais par ici ça doit être dur le vélo...et puis vous avez vu le prix d'un vélo ? ". On résiste à lui dire le prix d'une randonneuse " maison " ; n'aggravons pas notre cas, déjà dramatique. Toujours est-il que cette brave dame, sportive en puissance, prenait le bus pour descendre...à Contes le Bas. Quand nous sommes partis, pour éviter un scandale, nous avons remis nos maillots mouillés, après passage à l'air libre de l'épiderme, un peu plus loin, car avec les 9°dehors, on nous aurait pris pour des esquimaux. Nous naviguons tout l'après-midi dans une épaisse humidité, avant de trouver un hôtel à Lucéram, petit bourg au-dessus de l'Escarène. Nous voici donc au sec dans une grande chambre, style années 30, où pour obtenir de l'eau tiède au lavabo, il faut laisser couler 10 mn ! A croire que l'installation a été faite en forme d'alambic (qui sait cela peut toujours servir !). Le dîner est servi par le chef dont l'allure en dit long sur son appétit...et ses plats sur sa gourmandise. Pour parachever cette soirée mémorable, la patronne du bistrot (c'est la même maison) est digne d'un film : sèche, la cigarette rivée au coin des lèvres, elle joue à la belote avec les habitués. Les clients récents (nous) sont donc servis par des clients plus connus qui vont même jusqu'à encaisser la somme due ! Ajoutez un beau perroquet dans un coin de cette salle pittoresque et enfumée, vous avez le décor. La pluie ayant stoppé, nous allons visiter le village perché. Une multitude d'escaliers, ruelles, arcades, cours vous montent et vous descendent entre ces maisons tassées les unes sur les autres. Construits pour être facilement défendus en des temps plus troublés qu'aujourd'hui, quelquefois loin des cultures et de l'eau, beaucoup de ces villages meurent, leurs habitants s'étant installés plus confortablement dans les vallées. Peut-on leur en vouloir ? Les cultures en terrasse demandaient beaucoup de travail, les orages les emportant souvent, il fallait prendre la hotte sur le dos et aller rechercher terre et cailloux... Le matin il fait très beau, mais hélas le soleil aidant, l'eau tombée s'évapore rapidement et reforme des nuages. Nous voyons tout de même un beau panorama de la table d'orientation de Péira-Cava. Il ne fait pas très chaud. Nous sommes sur la route du col de Turini qui passe au milieu d'épicéas dignes de ceux du Jura. Le temps se couvre de plus en plus, nous redescendons sur le col de l'Alble et en changeant de vallée au col de Braus nous découvrons un paysage étendu...au soleil. Nous restons 2 soirs à Sospel, le temps d'aller chercher le BPF de Notre-Dame des Fontaines. La chapelle était fermée mais la vallée et les gorges de la Roya dominées par Saorges sont des choses à voir. Le lendemain, nous rallions Menton par le col de Castillon. Nous renonçons à la visite du musée océanographique de Monaco tant la circulation nous exaspère. D'autant que c'est bien plus joli vu des terrasses de la Turbie, 450 m plus haut. Le trophée des Alpes nous étonne par sa grandeur : 35 m de haut après restauration. Initialement il en mesurait 50 ! 38 m à la base. Il a, hélas, été tour à tour transformé en château, prison, carrière de pierre ! Nous gagnons Nice par la Grande Corniche...Les vacances sont finies. Cette dernière route au-dessus de la mer est une belle conclusion, elle nous invite à retourner dans cette région merveilleuse, mais de grâce, pas en juillet-août ! Bénédicte et Jean-Pierre RABINE |