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CHEZ NOS COUSINS GERMAIN

Revue N° 18 Page 56

Pourquoi randonner dans les "Siebengebirge" ? Si loin de mes pénates ? Quelle était l'origine de ce fluide magnétique issu d'un massif montueux ? Das Siebengebirge. Les Sept-Monts ! Bigre, pourquoi sept alors qu'il y en a plus de quarante ! Creusons, il y a certainement une explication.

Sept n'est pas le chiffre quelconque que vous croyez. Nos Anciens le savaient, le consacrèrent et en firent un chiffre biblique : " Dieu créa le monde en six jours et se reposa le septième : les frères d'Ephèse, au nombre de sept, dormirent dans un trou pendant les 155 ans de la persécution des chrétiens : Rome, chef-lieu de la papauté, est adossée à sept collines : ect... "

Ma boulimie coliteuse ne ressemble-t-elle pas bizarrement à un des péchés capitaux ? Maintenant, il se peut que ce soit les signes cabalistiques de la Michelin, en forme de pyramide -une des rares merveilles du monde visible-, qui aient été à l'origine de cette émigration. Etrange ! Et l'hypothèse du surnaturel, Y avez-vous songé ? Le relief des Siebengebirge est-il réellement l'œuvre de sept géants qui creusèrent un passage pour le Rhin entre le Drachenfels et le Rolandseck ? Les monts n'étant que les mottes de terre accrochées à leurs bêches. A vous de juger !

A cette légende, je lui en préfère une autre qui circule dans ces vignobles septentrionaux de la vallée rhénane. Il ne me déplairait point, en effet, de m'identifier à Siegfried des Mibelungen qui défit le dragon et se baigna ensuite dans son sang.. Si le héros de la chanson de geste rechercha l'invincibilité, pour ma part, omettant de consommer le " Drachenblut " -cru de terroir-, je perdis la bonne occase de déguster un divin nectar. Errare humanum est.

Autre raison de l'itinérance ! Le Grosser Olberg. A chaque lecture de cartes, mon regard convergeait vers ce Mont des Oliviers, qui dans l'Antiquité était déjà un symbole d'abondance. En l'occurrence, quelle belle moisson de monts ! Bref, un ensemble suffisant de mobiles pour aller saluer mes cousins germains.

Au fait, maintenant : inspectons nos taupinières à la loupe. Le Grosser Olberg, qui culmine à 461 m, est certainement une des éminences les plus fréquentées du massif. Il présente une dénivellation de 400 m au départ des bords du Rhin avec un ultime kilomètre non revêtu à plus de 13 %. Au sommet, je n'y vis point septentrion. Normal en ce début de belle journée d'hiver où le soleil s'attacha à me réchauffer le cuir à plus de 30° centigrades me transportant par la même occasion au septième ciel. J'y croisais des septuagénaires, qui la peau du ventre bien tendue par les excès pantagruéliques, ahanaient dans cette taupinière et qui pour sûr, ont du mettre une éternité avant de fouler la terrasse de l'auberge sommitale.

Le " Petersberg ", le voisin du précédent, se prête mieux aux ébats des cyclos qui abhorrent les chemins non revêtus. Au terme d'un final à 15 %, on pénètre dans la cour d'une abbaye, digne d'un repère de l'agent 007. Vue plongeante sur le Rhin et la capitale de la République Fédérale d'Allemagne.
Le plus populaire et le plus fréquenté des monts des " Siebengebirge " est sans contexte le Drachenfels, le rocher du dragon. Le même qui fut défait par notre héros Siegfried. Véritable belvédère, il fait découvrir les îles de Nonnenwerth et de Grafenwerth. Le faite du rocher a été étayé par les soins du " Land " mais je n'exclus pas -ne sommes-nous pas au pays des légendes- que ce soit les compagnons de Blanche-Neige qui aient consolidé nuitamment le rocher en y injectant du béton. Mais... " il n'est au vrai si brave nain, qui ne joue son tour de vilain ". Aussi braves ripuaires, gardez-vous que la montagne ne s'écroule un jour sur vos " tiestes " !

Il fallut arracher le "Löwenburg". Effort bref mais rude. Après ce solide coup de rein, du haut de la tour du château féodal, on embrasse une vue panoramique de la vallée me confirmant du coup l'absence de sept mâts sur les eaux du Rhin. Sur un des remparts, des jeunes gens dégustaient du fromage qui ressemblait étrangement à du septmoncel jurassien mais dont l'odeur me fit décamper. Je ramassai mes "sieben Sachen" -c'est à dire tout mon saint-frusquin et, chaussant mes bottes de sept lieues, quittai ces lieux boisés propices aux escarmouches sous la guerre de sept ans.

Quant au " Geisberg ", il me fit tout bonnement perdre les pédales tant au point que c'est grâce au prix d'un violent effort de poussage que je parvins à me hisser à la hauteur du refuge. Blick auf Drachenfels.

Au suivant ! Le " Asberg ", en d'autres termes le mont la bémol ou plus simplement le mont musique, m'envoûta à chaque lecture de carte. Hélas, l'air ne fait pas la chanson. En fait, il ne reste que les squelettes de deux éminences accolées, témoins d'une exploitation outrancière de basalte. De là, vue imprenable sur les " Siebengebirge ". Toutefois, pour peu que Phébus fasse la nique à Pluton, il n'est pas improbable que le visiteur soit gratifié d'un arc-en-ciel parfait.

Septimo sera le chant du cygne. Le " Lohrberg ", venant juste après le Geisberg, ne m'inspira guère car son ascension avait, me semblait-il, trop de points communs avec le précédent. Il ne fut pas le seul à être évité. Loin s'en faut.
En effet, le Hirschberg, le Wolkenburg, le Schmallenberge subirent le même sort ; même le Nachtigallental (la vallée des rossignols) et le Drachenburg furent escamotés.

Tout compte fait, consacrer une seconde journée à cette merveilleuse région ne serait pas un luxe. Affaire à suivre ! Mais que vient faire le Cent Cols dans tout çà, me direz-vous ? Devinez ! Et bien, il a été de la fête. Incroyable mais vrai, un col balisé en due et bonne forme -le Margarethenhohe- 323 m blotti entre le Grosser Olberg et le Lohrberg est venu couronner une journée pleine de péripéties.

Un col en Rhénanie, l'auriez-vous cru !

* Das Siebengebirge est un massif montagneux situé en regard de Bonn, capitale de la R.F.A.
* Les bords du Rhin sont à éviter : circulation dense.


FBC - J. Bruffaerts


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