C'était à la mi-août. Le matin, nous étions plutôt indécis en enfourchant nos fidèles montures. Le temps était gris et ne laissait présager rien de bon dans un proche avenir. Nous décidâmes d'aller dans un premier temps jusqu'à Ste Marie de Campan, pour opter ensuite pour Aspin ou Tourmalet suivant la météo. Le ciel se dégageant au fur et à mesure de notre progression dans la vallée de Campan, c'est à droite et vers le géant des Pyrénées que nous bifurquâmes finalement. Il y avait beaucoup de monde à pédaler sur cette route de légende, dans les deux sens, et juchés sur les montures les plus diverses, certains ahanant même péniblement sur de lourds V.T.T. Les durs kilomètres entourant la Mongie furent négociés sans encombre, et nous arrivâmes enfin au sommet du Tourmalet (2215m) sur le coup de midi. C'était l'heure idéale pour manger, aussi nous nous engouffrâmes dans le refuge-auberge, et peu de temps après nous étions attablés devant une garbure, suivie d'un ragoût de poule avec pommes de terre, bref, un repas pas vraiment léger, mais de quoi faire sans encombre la descente sur Bagnères de Bigorre. En quittant l'auberge, je fis homologuer ma carte B.P.F puis je m'attardais quelque peu sur le 1ivre d'or de l'établissement signé par Alain Prost lui-même lors de "l'étape du Tour" courue quelque temps auparavant. C'est en sortant sous un soleil maintenant radieux que Jean-Louis me baratina pour aller gravir le Pic du Midi, en me disant que c'était l'occasion idéale, qu'il fait beau, qu'on avait le temps, qu'il me manquait des cols de plus de 2000 mètres, que c'était bête d'être montés jusque là et de ne pas en profiter pour aller jusqu'en haut, qu'il faudrait revenir exprès, etc... Nous nous engageâmes donc sur ce chemin poussiéreux et caillouteux et néanmoins à péage (5F pour les vélos), le préposé nous recommandant même de bien faire attention à ne pas crever. Au début cela se passa plutôt bien, la pente étant raisonnable et le chemin dans un état acceptable. Puis, après le col de Sencours (2378m) le pourcentage augmenta, le chemin devint de plus en plus chaotique, les roues patinaient dans la poussière, le tout sous une chaleur franchement accablante. De plus, les voitures ne nous ménageaient pas, nous laissant guère de place et nous projetant de la poussière en abondance, comme pour mieux nous narguer. |
Heureusement de nombreux marcheurs, connaisseurs en matière d'effort gratuit, gravissaient eux aussi la même ascension et ils ne nous ménagèrent pas leurs encouragements. Il faut dire que nous étions les seuls à grimper à vélo. Nous n'en vîmes pas d'autres non plus en descendant. Où étaient donc passés les nombreux vététistes aperçus le matin même sur les pentes du Tourmalet? Le ciel très dégagé laissait entrevoir une perspective à couper le souffle sur les sommets Pyrénéens. Et du souffle, il en fallait pour en finir avec cette ascension qui semblait interminable. La sueur perlait de plus en plus. Si on lâchait le guidon pour boire, c'était la chute assurée. Bref, une véritable aventure dans l'anonymat total. Et soudain le dérailleur arrière faillit, la chaîne sauta, d'où une halte forcée. Jean-Louis n'ayant rien vu, je dus la remettre moi-même, et repartir malgré le fort pourcentage, Dieu seul sait comment! Nous atteignîmes finalement le col des Laquets (2650m) où une boisson enfin fraîche me récompensa de tous mes efforts. Les autres consommateurs nous regardaient d'un drôle d'air, gratifiant notre ascension d'épithètes flatteurs et admiratifs. La descente fut à l'image de la montée, chaotique et poussiéreuse, à tel point que revenus au Tourmalet on avait peine à deviner la couleur initiale des vélos. Le retour vers Bagnères de Bigorre fut une formalité, seulement troublée par une circulation automobile intense et quelque peu désordonnée. Caroline ROUGIER N°3336 Randonneurs Cyclos de l'Anjou |