Un jour sur son vélo, allait je ne sais où
Un cyclo déjanté, hagard comme un hibou.
Il poursuivait une chimère,
Ayant pris la tangente dès le lever du jour
Et semblant aussi cuit qu'à la sortie d'un four
Avec sa casquette de travers.
Le chemin qui montait lui donnait le tournis,
Fourbu par tant d'efforts, il n'avait qu'à s'étendre,
Mais il crut mieux faire de prendre
La pente raide d'un raccourci,
Soufflant comme une loco lancée à toute vapeur.
Après quelques moments, la fatigue vint : le cyclo,
S'accrochant alors, d'un sursaut
Se hissa sur la crête, tout baignant de sueur.
La vue ne lui plut guère, il s'attendait à mieux
Et montrait un air dédaigneux,
Tel le premier de la classe.
"Pas terrible ! se dit-il ; moi, cyclo que je fasse
Ce seul petit col ? Mais, pour qui me prend-on ?"
Le collet délaissé, il tourna le guidon
Et d'un geste rageur, reprit son ascension.
"Il me faut cette brèche !". Il se sentait balèze
Bien que sans ravito : tout alla de façon
Qu'il n'eut soudain plus de boisson.
La fringale l'ayant pris, il fut bientôt fort aise
De redescendre sur le goudron.
Ne soyons pas si difficiles,
Les meilleurs rouleurs sont eux aussi fragiles,
On hasarde de couiner, voulant trop haut grimper
Sans s'être bien ravitaillé.
Maurice OCCELLI N°3975
de GRENOBLE (Isère)