Page 22 Sommaire de la revue N° 30 Page 24b

A l'assaut du Parpaillon

Revue N° 30 Page 24a

Fin août, dernier jour de vacances dans les Alpes. Près de trois semaines de séjour nous ont vu parcourir un millier de kilomètres et franchir une quarantaine de cols, d'abord dans le Vercors en guise d'acclimatation à la montagne, puis dans le Queyras aux dénivelés plus accentués. Il nous reste un objectif à atteindre : le mythique col du Parpaillon (2637m) et ses neuf ultimes kilomètres de piste muletière.

Après plusieurs jours de grand beau temps, l'orage de la nuit a brouillé le ciel, de nuages qui s'accrochent aux flancs des montagnes. Mais la météo annonce le retour du soleil sur la région ; alors, pas d'hésitation, c'est le moment d'y aller ! Une fois les vélos fixés sur la galerie, nous prenons la direction de Saint-André d'Embrun, petit village calme repéré la veille lors de l'escalade du col de la Coche. La voiture garée sur la place de l'église, à l'ombre d'un superbe tilleul, les vélos préparés et les bidons remplis à la fontaine toute proche, c'est un peu avant 10 heures que nous enfourchons nos montures pour une grimpée de presque 25 kilomètres et 1700 mètres de dénivellation. "Nous ne serons pas avant midi au sommet, c'est certain !"

A peine quelques centaines de mètres parcourus et déjà nous plaçons la chaîne sur le tout petit plateau : elle n'aura guère l'occasion de remonter sur le 42 dents, la pente n'offrant que peu de répit. Une première halte de courte durée pour admirer le point de vue sur la ville d'Embrun dans la vallée de la Durance, et c'est reparti. Le hameau du Villard traversé, une légère descente permet de récupérer un peu avant de franchir le torrent du Crévoux. Nous en profitons pour ôter le maillot, la carte Michelin annonçant un pourcentage plus important et, pas d'erreur, l'allure se réduit, la sueur se fait plus abondante, surtout que le soleil commence à percer la couverture nuageuse qui nous empêche de voir les pics environnants. A partir de Praveyral, nous récupérons des efforts fournis tout en continuant à progresser jusqu'au village de Crévoux où une pause casse-croûte à la fontaine est la bienvenue. Tout en haut du petit bourg, une supérette nous permet d'effectuer quelques achats : provisions et cartes postales. Mais il faut repartir, et plutôt que redescendre sur La Chalp, nous prenons l'itinéraire VTT qui rattrape la D39 par un chemin caillouteux nous donnant l'occasion de pratiquer une autre activité bien connue des adeptes de la "cyclomuletade" : la marche ! Nous en profitons pour prendre les premières photos de la journée en fixant sur la pellicule les pentes des pics Saint-André et de Chabrières.

Le retour sur le goudron est le bienvenu, la route étroite s'élève dans la forêt et l'ascension devient plus sévère. L'obstacle est cependant passé grâce au plus petit développement, quand se présente la portion la plus délicate à négocier : le chemin muletier.

A partir de là, notre progression ralentit encore, car, il faut éviter pierres, cailloux, traînées de sable, et les ravinements causés par les pluies, nous empruntons le plus souvent le bord extrême de la piste, passant d'un côté à l'autre afin de choisir la meilleure surface de roulement. Dans cet exercice parfois acrobatique, nous ne sommes pas gênés par la circulation ; nous sommes seuls à monter là-haut, même les véhicules motorisés se font rares et nous ne nous en plaignons pas. La forêt de conifères s'éclaircit et, à un détour du chemin en lacets, nous découvrons le panorama grandiose sur la montagne du Parpaillon qui culmine face à nous à 3000 mètres. Sur sa gauche, une plate-forme herbeuse nous accueille pour une pause méritée durant laquelle nous pouvons admirer le cours du torrent qui scintille au plus profond du ravin, car le soleil se fait de plus en plus généreux.
Ensuite, alternant pédalage et poussage, nous continuons à nous élever parmi les alpages où paissent quelques troupeaux de bovins. Bientôt retentissent les premiers sifflets de spectateurs intrigués par une présence étrangère et nous surprenons ainsi de nombreuses marmottes qui détalent dans l'herbe, traversent la piste ou font le guet, immobiles. C'est pour nous l'occasion de multiples arrêts afin d'observer ces sympathiques rongeurs à la jumelle et prendre des clichés du splendide paysage qui s'offre à nos yeux d'habitants de la plaine éloignés des massifs montagneux. Tout doucement notre but approche et nous arrivons enfin au pied des grands lacets où il vaut mieux prendre les virages à l'extérieur en slalomant entre les pierres éparpillées sur le sol. Nous apercevons l'entrée du tunnel à seulement quelques centaines de mètres et dans un dernier effort, nous terminons cette rude ascension pour aboutir sur une vaste plate-forme où souffle un vent glacial. Nous sortons les appareils photos afin de fixer l'événement pour la postérité, enfilons rapidement maillot et "Goretex", puis essayons d'apercevoir l'autre extrémité du tunnel et inscrivons sur l'un des autocollants apposés sur la grande porte, notre nom, celui de notre groupe cyclo, sans oublier de mentionner notre appartenance au Club des Cent Cols !

Maintenant, il nous reste à trouver un abri pour pique-niquer, car la faim se fait sentir ; pour cela, nous devons entamer la descente lentement, parfois à pied, jusqu'à une cabane de berger où, protégés du vent et face au soleil, nous pouvons enfin nous restaurer avec nos provisions tirées du sac de guidon. Le calme des lieux est interrompu par le passage régulier d'une demi-douzaine de 4x4 qui montent au col en soulevant un nuage de poussière. Après cette longue pause, nous pouvons admirer encore une fois la beauté de ce paysage minéral où subsistent des plaques de neige. Nous reprenons nos montures et nous nous élançons prudemment, freins serrés, sur la route du retour. De temps en temps, nous parcourons deux ou trois cents mètres en marchant, histoire de nous dégourdir les mains et les poignets mis à rude épreuve.

Avec le retour sur le bitume, nous prenons de la vitesse, mais il faut rester vigilants, car, la chaussée est étroite, bosselée et de forte déclivité : "pas étonnant que ce matin, en sens inverse, le passage se soit avéré particulièrement difficile !". A partir de La Chalp, la route s'élargit, le revêtement s'améliore et la visibilité devient parfaite, car nous sommes sortis de la forêt. Encore deux ou trois arrêts pour nous imprégner de la nature sauvage des parois et des crêtes environnantes, puis nous nous laissons emporter par la pente tout en négociant au mieux les derniers virages.

Nous nous retrouvons sur la place de Saint-André, toujours aussi tranquille en cette fin d'après-midi estival. Après une légère collation accompagnée d'un rafraîchissement bien mérité, les randonneuses installées sur le porte vélos, nous rentrons au camping municipal de Guillestre, fatigués, mais satisfaits de cette nouvelle sortie cyclomontagnarde, en attendant l'an prochain pour d'autres aventures à plus de deux mille mètres.

Michel et Cathia DESCOMBE N°1412 et 4999

d'ARVERT (Charente-Maritime)


Page 22 Sommaire de la revue N° 30 Page 24b