Je m'appelle Follis, je ne suis plus tout jeune, j'en suis à ma 14 ème année de service. Ce matin, lorsqu'il m'ont sorti du garage, je faisais sérieusement la "gueule". Il pleuvait et "ils" avaient prévu de faire le 200 annuel de leur club : le tour du lac de la forêt d'Orient et retour.De plus, je relève d'opération ; on vient de me mettre une prothèse de pédalier arrière suite à une rupture soudaine d'un roulement lors d'une précédente randonnée. Alors, pour une reprise, un 200, et sous la pluie !... Oui mais, "ils" ont des objectifs pour cet été, alors, faut faire des bornes ! "Ils" m'ont parlé d'un Antibes - Thonon avec les sacoches, par les Préalpines entre autres. Oui mais, d'un temps pareil ! Rien que pour rallier le lieu de rassemblement, 3,5 km, je suis déjà trempé, minable. Peu de monde à cause de cette satanée pluie ; une vingtaine, que des "vélosolos", je suis le seul tandem. Et pourtant la météo annonçait pour ce samedi "début de matinée couvert, ensuite éclaircies et après-midi ensoleillé !". Tout le monde est parti, espérant que cette fichue pluie ne durerait pas. Au début, ça discutait un peu dans le peloton. Mais, au fil des kilomètres, la pluie continuant, agrémentée d'un fort vent de face, les têtes se baissent, les dos enflent sous les Gore-Tex ou capes et les silences se font de plus en plus longs. On n'entend bientôt plus que les signaux des capitaines de route pour annoncer les voitures ou les "bagnoles" venant de face ou de l'arrière. Et encore, au bout d'un certain temps, comme pour s'économiser, on ne les entend plus que dire "TURES" ou "GNOLES" pour signaler les batures ou les voignoles (ou le contraire). Alors, je pense aux trois cyclos d'Orléans qui, écœurés, ont fait demi-tour vers le kilomètre 40. Ils ont certainement eu tort, puisqu'il va faire soleil cet après-midi. Mais, je pense aux nombreuses et belles randonnées effectuées les années précédentes sous le soleil ; tour de Corse, tour de Crête, tour du Portugal où nous n'avons pratiquement pas rencontré de pluie. Tandis qu'aujourd'hui ! Nous approchons du lac de la forêt d'Orient. Il est midi et les éclaircies promises pour la fin de matinée sont totalement absentes; la pluie continue et le vent aussi. Je pense au pique-nique de la randonnée de l'Amitié de l'année dernière, il faisait chaud ! J'étais allongé dans l'herbe au bord du lac avec les autres, les "vélosolos", pendant qu'"ils" se restauraient. Assis dans la verdure. Je crois même que certains se sont offert une sieste ! Alors qu'aujourd'hui, le pique-nique s'est déroulé dans un café accueillant, pendant que nous avions trouvé refuge sous un petit appentis, serrés les uns contre les autres. Et nous sommes repartis, toujours sous la pluie, avec pour seul avantage le vent maintenant qui nous pousse. Si les cyclos avaient encore retrouvé leur "bagout" et leur entrain au café, mais de nouveau, ce ne sont que les mêmes silences de plus en plus longs, seulement entrecoupés par des " TURES " ou "GNOLES" des capitaines de route. |
Je continue de penser, pour passer le temps, aux belles randonnées de montagne, aux brevets montagnards sous le soleil, car j'aime la montagne, moi le non grimpeur par excellence ! Et je suis fier d'être des "Cent Cols" ! Oh, je ne monte pas bien vite, mais, quel plaisir d'arriver là haut ! Grand col ou petit col, c'est toujours comme une petite victoire. Bien sûr qu'il y a eu des galères, je n'ai pas toujours eu que du soleil. En montagne le temps change si vite ! Je me souviens du col Agnel en septembre 96, monté avec le soleil et redescendu par un froid glacial. Et aussi, en juin 99, au cours du Thonon - Venise, la descente du Grand St-Bernard, côté italien, sous une pluie glaciale. Je ne sais pas si c'est moi qui tremblait le plus ou " eux ", mais, j'ai failli rater la trajectoire à plusieurs reprises. Et ce samedi 13 mai 95, partir d'Auxerre pour un 200 kilomètres traversant le Morvan par l'Abbaye de la Pierre-qui-Vire sous une pluie froide et pénétrante, à Cussy-les-Forges, trouver la neige et continuer à rouler tant bien que mal dans deux à trois centimètres de poudreuse, ne voyant plus pancartes ni panneaux, la neige y étant restée plaquée ! Ce n'est qu'à Saint-Léger-Vauban qu'ils ont pu se revigorer au restaurant d'où "ils" ont pu appeler leurs familles pour venir nous chercher, car il était impossible de continuer dans cinq ou six centimètres de neige. Nous nous sommes retrouvés à trois (et encore parce que personne ne pouvait nous ramener). Il y avait là le cousin Cattin piloté par Michel ainsi que Brigitte et le " vélosolo " de Claude, qui effectuait son premier 200, et qui tenait à finir. Heureusement qu'il ne neige plus et qu'au sol la neige est molle et ne colle pas à mes garde-boue ! En forêt de Saint-Germain, quel spectacle ! Les branches des arbres, chargées de neige se courbent jusqu'au ras de la route, nous obligeant à slalomer entre elles. Et cette montée de Vézelay, dans la neige ! Heureusement qu'elle ne tombe plus, et sous un ciel éclairci, nous terminerons nos quarante derniers kilomètres sous le soleil ! "TURES" et "GNOLES" me ramènent à la réalité. Il pleut toujours et l'eau est partout, dans les fossés qui débordent sur la route. Tous ces souvenirs ont eu au moins le mérite de me faire trouver le temps moins long. Bien qu'il ne reste qu'une dizaine de kilomètres, je continue à rêver, espérant que le beau temps revienne. Hélas, c'est sous une pluie continue que l'on terminera ce 200. Mais, dis donc, au fait, nous n'avions pas encore fait de 200 sous une pluie continuelle ! Un souvenir de plus. André et Odile GIRONDEAU N°2727 - 4195 de BASSOU (Yonne) |