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VEILLEES D'ARMES

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Que faire, au Lavandou, la veille du Brevet des Cimes Varoises ? Tenter de corriger le bronzage " cyclo " (noir-blanc-noir) en sacrifiant au rite de la plage ? Courir les pharmacies locales à la recherche du produit miracle ? Nos trois Savoyards avaient bien envisagé toutes ces saines occupations pour ce vendredi de l'Ascension. Tout à coup, l'un d'eux énonça tout haut ce que les deux autres osaient à peine imaginer tout bas :

" Et si on allait " se faire " les cols de l'île de Port-Cros ? ". Après les objections d'usage, ce plan recueillit l'unanimité des présents, dont l'un fit remarquer que même les jours de repos, n'est-ce pas, il faut bien rouler... ".

C'est donc la conscience tout à fait tranquille que trois cyclos se présentèrent au port, avec un seul vélo (pour limiter les frais), et sans leur maillot de club - ceci pour sauvegarder la réputation de leur Vallée de Thônes natale. La première difficulté du parcours consista à vaincre la réticence du chef de quai, ce qui fut obtenu facilement grâce à la formule magique : " c'est pour un pari " ; à leur grande surprise, ils n'eurent même pas à essuyer la plaisanterie facile : " allez-y donc en pédalo ! ".

Après une traversée sans histoire de 35 minutes, l'île apparut aux yeux émerveillés des trois intrépides comme un massif escarpé couvert de verdure. Le bateau contourna un cap rocheux et ils découvrirent Port-Cros, petit port d'opérette qui regroupe quelques maisons au pied d'un château. Le chemin d'accès au col fut vite repéré avec l'aide de la carte du Parc National, qui les informa aussi de l'interdiction de pêcher, de camper, de chasser...heureusement, le vélo semblait oublié de la liste.
L'un après l'autre, les cyclos se lancèrent à l'assaut des 116 mètres du col des Quatre Chemins ; ils escaladèrent d'abord deux rudes lacets d'une chaussée bétonnée, au milieu d'une végétation exubérante, puis mirent le cap sur le sud-est vers le col, atteint après une traversée goudronnée d'un kilomètre. Là, pas question de continuer sur la voie en dur : un chemin caillouteux et ombragé, fréquenté par quelques rares promeneurs étonnés, les mena l'un après l'autre vers le col de Port-Man, qui domine de 121 mètres l'azur profond de la baie homonyme. Seul le teuf-teuf des yachts venait rompre le bruit de la nature, les voitures étant inconnues dans l'île - mis à part celle d'un garde du Parc, qui poussa l'un des amateurs de cols à s'enfoncer discrètement sur un chemin de traverse.

Le reste de la journée se passa à errer dans l'île et sur les terrasses du port, en poussant une bicyclette devenue soudain bien encombrante - et dont l'utilisation était évidemment nécessaire pour inscrire ces deux cols sans doute très peu fréquentés par les membres de la confrérie, en dépit de leur modestie. L'après-midi tirait à sa fin lorsque les cyclos ré embarquèrent vers le continent et la civilisation : cette sortie les avait mis en appétit pour le Brevet du lendemain. Ils n'allaient pas être déçus.

Laurent LARUAZ

SAINT JEAN DE SIXT (74)


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