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Bodi, Gabi... ravis !

Revue N° 22 Page 14

Bodi et Gabi cherchaient.

Bodi lui, voulait en premier lieu une Randonnée permanente, si elle comportait des cols, un maximum de cols, il appréciait, accessoirement s'il y avait des BPF, il ramassait. Gabi lui, voulait en premier lieu des BPF et plus exactement ceux de Saône-et-Loire qui lui manquaient pour compléter sa province Bourgogne et, s'il pouvait en même temps grimper des cols, un maximum de cols, il ramassait; accessoirement, si tout cela s'insérait dans une Rando Permanente, il appréciait.

Donc, Bodi et Gabi cherchaient si tout cela ne pouvait pas s'amalgamer. Enfin, torturer le "Où irons nous", la michelin 69 et le Chauvot, ils ont bien sûr fini par trouver. Un savant triturage de la Randonnée Permanente Beaune-Solutré-Beaune organisée par le vélo Club beaunois (M. Jaillet) leur a permis de prévoir 358 km répartis sur 3 jours leur laissant augurer une jolie récolte de 17 cols et 7 BPF. Belle moyenne, ont-ils conclu après la mise au point de leur projet.

La première journée commençait bien: Bodi et Gabi s'étaient transportés en Auto jusqu'à Beaune et avaient garé leur véhicule dans une station-service accueillante. Il était 11 h du matin, il faisait soleil, tout baignait. "M... s'écrit soudainement Bodi, j'ai oublié mes tendeurs et je ne peux pas fixer mes sacoches arrières". Étonnant chez ce garçon qui totalise plus de 40 ans de voyages cyclos. Heureusement, la station-service a pu réparer l'oubli et les voilà partis; Ils ont traversé Chalon-sur-Saône la fleurie et à la sortie trouvé une charmante terrasse ombrée par de beaux platanes pour le pique-nique du midi. "M... s'écrit Bodi, j'ai oublié mon bidon". Incroyable non, chez le cyclo de longue expérience qu'est notre Bodi, mais: "bof, on trouvera bien un bidon chez un commerçant quelconque".

Premier contrôle de la RP à Laives; les commerces sont rares mais il y a les PTT et Bodi aime les PTT; y avoir consacré toute sa vie professionnelle laisse des traces. Sur la porte du dit Bureau des PTT, une pancarte: GREVE, néanmoins la porte s'ouvre, la préposée nous inspecte à travers son hublot, oui elle fait grève, mais pour les cyclos pas de problème pour le coup de tampon "c'est pas pareil" nous explique t-elle (c'est vrai : pour le tamponneur, le tampon du cyclo, c'est de la joie dans le travail et jamais du travail même dans la joie). La cliente qui attendait derrière n'a pas apprécié ! Après cela Bodi et Gabi abandonnent le tracé de la RP pour une première variante qui va leur livrer le Col de Navois et le Col des Chèvres ; Ils retrouvent la RP à Brançion (BPF) avec le col de Brançion pour la reprendre aussitôt et franchir le col de Beaufer, le col de la Préole et arriver à Lugny, la halte du soir, 92 km étant avalés.

Peut-on trouver un bidon à Lugny ? Question qui préoccupe Bodi. Renseignements pris, il y a un garage qui FAISAIT du vélo. Ha ! Oui mais le garagiste interrogé a tout liquidé ; Aïe! mais il offre gentiment de commander l'article. Avec force remerciements l'offre a été refusée, pensez-donc, le bidon n'était pas livrable pour le lendemain matin 8 heures.

8 heures, c'est précisément l'heure du départ de la deuxième journée de leur "petit tour", comme l'a expliqué Bodi à l'hôtelière qui s'enquerrait des projets de nos deux compères.

Les cols de la Pistole, de la Croix, de la Percée (avec un petit aller et retour de 800 m sur la droite), des Quatre Vents sont avalés pour arriver à
Cluny, sur le parcours de RP retrouvée. Cluny, merveilleuse petite ville, avec vieux quartier piétonnier, son immense abbaye, son haras, tout cela, Bodi et Gabi le parcourent à pied, leurs traditionnelles chaussures de cuir noir ne leur posant aucun problème à ce sujet. "Tiens un vélociste !", et Bodi amoureux des teintes discrètes, toujours vêtu de gris de pied en cap, chevauchant sa chère mule 650 noire, se retrouve arborant un magnifique bidon rouge Coca-Cola, quelle horreur!

Reprenant leur variante, Bodi et Gabi sont accueillis comme de preux chevaliers par la fille du château à Berzé le Châtel (BPF) puis par le col du Bois Clair se dirigent vers Milly-Lamartine. Tout à coup un grondement naît dans le lointain, enfle et tonne. Est-ce un tremblement de terre ? "C'est le TGV" clame Bodi qui sprinte. Trop tard, le TGV a déjà filé, il est passé sous la route et n'est déjà plus qu'un lointain et mince serpent miroitant.
A Milly-Lamartine, Bodi et Gabi consacrent quelques instants à la maison d'enfance du poète Lamartine. A Pierreclos, Gabi demande à Bodi ce qu'il pense d'une variante dans la variante pour aller cueillir le Col des Enceints, 8 km AR. Bodi accepte mais par la suite en rebattra les oreilles à son compagnon, vous comprendrez bientôt pourquoi.

Enfin voici Solutré (BPF) et sa célèbre roche. C'est la pointe sud de la RP. Normalement, celle-ci repart vers le Nord. Bodi et Gabi eux, virent plein Ouest vers le Col du Carcan. Se présente alors une fourche de deux petites routes sans aucune indication ; Bodi irait bien à droite, Gabi lui, irait bien à gauche. Cent mètres plus loin des cantonniers obligeants indiquent qu'il vaut mieux aller à gauche, car ils viennent de gravillonner la route de droite, de toute façon ça grimpe des deux côtés. Effectivement, 646 m d'altitude seulement, mais un véritable escalier dont chacun de nos deux compères comptent péniblement les marches, chacun de son côté, et chose incroyable, Gabi a vu de ses yeux vu, arriver Bodi à pied; le Gabi en fut complètement estomaqué.
Cependant, au bout de la descente qui s'ensuivit, nouvelle discussion : le col de Grand Vent est là à 2 km hors parcours. Comme Bodi est bon avec Gabi il accepte cette nouvelle option tout en remarquant: "4 km de plus, ça en fait 12 avec ceux de ce matin !" Après cela, voici le col de la Croix de l'Orme et puis il y a Trambly et une nouvelle option : le Pas de la Sue à 2 km. Alors là Bodi grogne carrément; Rouler droit devant, il aime. Soleil, vent, pluie, ça passe, mais toutes ces circonvolutions de son compagnon pour gratter un col par-ci, un col par-là "c'est pas du boulot". Ce coup-ci ça fait 16km de plus que prévu". Gabi reconnaît en son for intérieur que son coéquipier n'a pas tout à fait tort, que l'étape s'allonge, que l'heure avance, mais il n'a garde de le dire; Il se tient coi, d'autant qu'il sait que l'attrait d'ajouter un col à la collection sera le plus fort. "L'hôtel du soir a été retenu" dit tout haut Gabi, "donc où est le problème?"

Par la suite il y aura encore le col de la Croix d'Auterre, le col des Vaux, un petit coup de fil à l'hôtel pour prévenir du retard et l'arrivée à Saint Gengoux le National (BPF), après 172 km, 12 cols, 3 BPF et un nombre incalculable de côtes. Parlez maintenant du Mâconnais à Bodi et Gabi ! Et comme l'a fait sèchement remarquer le 1er au 2ème "Tu ne me feras pas faire ça tous les jours".

La 3ème journée devrait être plus calme, elle le sera, sauf qu'un fort vent de 3/4 face les mettra " a l'ouvrage" comme dit Bodi. Mais qu'est ce bruit déjà entendu? "c'est Le TGV clame Bodi qui stoppe net sur le pont enjambant les rails. C'est impressionnant ce TGV qui fonce sur eux, et qui au dernier moment leur jette un grand coup de corne et file sous leurs pieds. Nos deux cyclos ont bien regretté de n'avoir pu répondre au salut du conducteur du monstre d'acier.

Bref voici Mont-Saint-Vincent, (BPF) perché sur sa bosse. Ce sera le premier coup de tampon de la journée à 600 m d'altitude et avec un vent d'enfer. De là, une route pratiquement directe va atterrir à Buxy lieu de contrôle de la RP. Mais à mi-parcours la ligne TGV coupe la route et Bodi s'arrête; Bodi est aimanté par le TGV. Il sera comblé, une minute d'attente et deux TGV se croisent, là sous ses pieds, Bodi est content. Tellement content qu'il mènera le train le restant de la journée contre vents et bornes.

Après Buxy, il n'y avait plus qu'à suivre l'itinéraire de la RP. Mais c'eut été négliger la Rochepot (BPF). Bodi était bien passé là en 1953 dans un de ces grands brevets qu'il affectionnait à l'époque, mais il ne s'intéressait pas au BPF qui lui semblaient alors inaccessibles ; Depuis Gabi l'a converti. Après les options acceptées la veille par Bodi, Gabi aurait mauvaise grâce à ne pas accepter celle proposée par Bodi. Ce fut donc dans la bonne humeur que nos deux randonneurs entrèrent dans Beaune, terme de leur périple, après 94 km.

"Contrat rempli" a énoncé sentencieusement Bodi. "Une province de plus" a ajouté Gabi, "Et combien de cols ?" a demandé Bodi, "17" a répondu Gabi. Ils étaient ravis. Ne restait que le retour.

- Perdoux dans leur collargie*, leur dusseaurtation a alors roulé sur leur collection des -2000, +2000 et potyti et patata... Vous voyez le topo !

* du latin collum et du grec argia, fig. rêverie, songerie, propre aux membres de la confrérie des 100 cols.

Guy BARILLET N°2959

Reims (Marne)


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