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Le Col de l'Aution.

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- C'est dans les Alpes Maritimes et le guide Chauvot.
- Selon les cartes c'est AUTION ou AUTHION.
- De même que la baisse de Levens n'est pas à côté de Levens, le col de l'Authion n'est pas dans le massif de l'Authion qui flirte avec les 2000 mètres au nord du col de Turini à 1607 m.
- Les armées de la République s'y sont battues en 1793 et en 1945 : l'ennemi n'était plus le même. Il en reste des ruines, des fils de fer barbelés, rouillés et des monuments.
- Plus au nord et plus haut se trouve le Pas du Diable à 2410 m et le Pas des Déserteurs à 2398 m que je ne connais pas encore mais un jour je déserterai pour aller le faire !
- Le col de l'Authion n'est qu'à 1424m entre la Tinée et la Vésubie.
- Il y a longtemps que j'avais repéré ce col perdu dans la nature, que j'en avais envie mais à l'idée d'un déplacement pour un seul col mon avarice et ma paresse m'en avaient facilement dissuadé. Pourtant avant de devenir trop vieux, il faudrait bien que, la gourmandise étant la plus forte, je me l'offre pour satisfaire ma convoitise.

C'est ainsi que le 3 août 1994, en pleine canicule, j'ai réussi à me sortir du lit avant 6 heures... pour prendre un train matinal pour les 30 km qui me séparent de l'embouchure du Var et, à partir de là, commencer l'ascension du col par 30 km de faux plat. J'étrennais pour la circonstance un maillot rouge tout neuf, amoureusement choisi et offert par une ancienne championne de France de cyclisme sur route. -ce n'est pas Longo !- J'aurais dû en avoir une énergie et un moral renforcés mais ça ne vous donne pas automatiquement des jambes triomphantes et l'état de grâce.

Vers midi, après avoir mis plusieurs fois pied à terre j'étais quand même arrivé vers 1400 m d'altitude sur route goudronnée, celle qui par la Tour sur Tinée monte aux Granges de la Brasque à 1687m. J'étais juste en face du col de l'Authion mais au-delà d'un vallon sur une autre ligne de crête... un vallon infranchissable, j'ai essayé puis renoncé... et j'ai renoncé à monter jusqu'aux Granges de la Brasque pour redescendre au col par une piste forestière.

J'ai fait demi-tour, je suis revenu à la maison, crevé et bredouille et même, honte à moi, en me faisant véhiculer, mon vélo et moi-même dans une camionnette de chantier. Il ne suffit pas de vouloir un col... il faut aussi savoir et pouvoir. Il faut aussi que ce col vous accepte, il faut qu'il veuille se donner à vous... Il faut se mériter mutuellement... C'est comme une femme, il faut savoir la prendre du bon côté, au bon moment.
J'avais essayé le côté par l'ouest, j'ai renoncé... J'aurais pu essayer par-dessus par le nord, j'ai renoncé... J'essaierai donc par-dessous par le sud... C'est ainsi qu'en juillet 95, en pleine canicule, avec les mêmes sentiments, la même volonté, la même envie, j'ai repris le même train à la même heure mais je n'ai fait l'approche vélo que jusqu'à 600 m d'altitude, jusqu'à Pelasque, dans la Vésubie. J'ai laissé le vélo à l'ombre, enchaîné à un arbre avec mes coordonnées au cas où... j'ai trouvé un bâton à ma mesure et je suis parti à l'assaut de mon Everest de poche. Tout a commencé par un agréable sentier en sous bois le long d'un petit canal à l'eau très claire et très fraîche... Puis il a fallu plonger vers un torrent, le franchir, grimper sur l'autre rive, franchir un autre torrent et de là grimper vers les cimes pour environ 900 m de dénivellation en suivant un balisage, en le perdant, en le retrouvant à travers une végétation touffue sur un sol très pierreux.

Lorsque j'approchais d'une crête je pensais arriver près du col mais je découvrais une autre crête plus loin et plus haute qui en cachait une autre puis encore une autre... De crête en crête je suis arrivé au pied d'une pyramide qu'il a presque fallu escalader à quatre pattes jusqu'au sommet à 1504 m : cime de l'Authion... un panorama de rêve, sauvage... après 3 heures de marche... Le ciel s'est fait menaçant, j'ai hésité à descendre 80 mètres en contrebas vers le col qu'il aurait fallu remonter. Je n'ai entendu aucune voix divine, je n'ai reçu aucun message mais ma petite voix intérieure m'a recommandé de ne pas m'attarder en ce lieu et je suis redescendu prestement... même qu'en glissant dans les cailloux je me suis cogné le coccyx... sur un rocher. Revenu à Pelasque vers 16 h, le clocher de l'église insensible aux mouvements célestes et aux directives humaines continuait de donner son heure et sonnait 9 heures... je ne sais pas si j'essaierai encore une fois d'aller au col de l'Authion... par un autre itinéraire... et avec mon vélo.

Paul ANDRE N°113

MENTON (Alpes Maritimes)


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