14 août : je m'installe à Barcelonnette avec comme objectif de franchir un "grand" col pour mon 2000ème. J'ai choisi le col de la Petite Cayolle (2642 m), le col de la Cayolle qui permet d'y accéder devant être mon 1999ème col. 15 août, la météo est favorable, je pars. Peu après le départ, la route devient superbe, étonnamment étroite (on devient, hélas, habitué à ce que toutes les routes s'élargissent, surtout dans les endroits touristiques). Les paysages sont variés: d'abord les gorges du Bachelard, puis une vallée boisée dominée par des pics impressionnants. La lumière rasante du matin m'inspire et je prends quelques photos. La pente est raisonnable, il y a même des portions de plat pour se reposer... Enfin, avec l'altitude, les arbres disparaissent, les paysages deviennent plus sauvages et la pente s'accentue mais c'est un régal. J'arrive donc au col de la Cayolle tout content, je franchis, fais demi-tour et attaque aussitôt le sentier menant à mon objectif. Là, bonne surprise le sentier est en grande partie cyclable et je ne me prive pas du plaisir d'y rouler. Les piétons me laissent passer et je les en remercie. Bientôt j'aperçois en face de moi ce fameux col. Je distingue très nettement des randonneurs qui s'y reposent. Je m'y vois déjà quand un piéton reste en travers du chemin contrairement aux autres.... Je m'arrête et lève les yeux qui étaient surtout occupés à repérer les pierres parsemant le sentier ! C'est un jeune homme. Il me dit "vous ne savez pas que vous n'avez par le droit de faire du VTT ici ?" En le regardant de plus près, j'aperçois un écusson de l'ONF et l'emblème du Mercantour sur sa manche gauche. Il est habillé en vert kaki: ce doit être un garde... Je tombe des nues, lui montre mon ignorance. Il m'explique que les VTT sont interdits sur tous les sentiers et toutes les pistes du Mercantour et que des panneaux le rappellent. Trop de gens redescendent à travers les alpages... Je lui montre que je n'ai pas un VTT, c'est un 650 avec garde-boue, porte bagage, sacoche mais avec un cintre de VTT, lui certifie que je ne roule que sur les sentiers, prétexte la beauté du paysage derrière le col (le lac de la Petite Cayolle), lui propose de jurer sur l'honneur que je ferai le reste à pied y compris la descente... Rien n'y fait, il ne veut pas me laisser passer ! je ne peux lui parler du Club des 100 cols ni de l'importance de mon 2000ème... |
Il me suggère de laisser mon vélo là et de continuer à pied. La mort dans l'âme ne voyant pas d'autre solution je finis par m'y résoudre. Je cache mon vélo dans un trou de névé et finis l'ascension.Le garde est monté devant moi mais tout le long m'a observé... Au col, malgré la beauté du site, le corps n'y est pas. Je prends quelques photos et redescends rapidement, récupère mon vélo, et poursuis la descente en selle (vengeance !) Au col de la Cayolle, je veux boire : plus de bidon ! on a volé mon bidon ! je lui avais bien dit au garde qu'on pouvait voler mon vélo ! Cette nouvelle déception digérée en guise d'apéritif, je décide de pique niquer sur place. Le site est grandiose et il est midi. Je réalise bientôt que je n'ai plus qu'une chaussure sur le porte-bagage arrière (j'ai fait l'ascension routière avec des chaussures de cyclisme aux pieds et des tennis sur ce porte-bagages pour le chemin muletier c'était l'inverse en prévision de la marche). Décidément, ce n'est pas mon jour de chance ! J'attaque ma boite de riz au lait sans grand appétit. Tout en mangeant je rumine les péripéties de la matinée, des idées naissent et mûrissent. Je finis par réaliser que cette perte de chaussure est finalement une chance ! Ce sera un prétexte pour revenir. Et le bidon volé ? Une deuxième chance ! Ce sera l'argument pour remonter avec mon vélo que je ne peux laisser avec tous ces voleurs qui rôdent... mais ma joie est de courte durée. En réfléchissant davantage, je réalise que tout ceci ne tient que jusqu'à l'endroit où j'avais laissé mon vélo. Je finis par imaginer un ultime prétexte au cas où je rencontrerais mon garde après cet endroit. J'aurais malencontreusement oublié ma boussole dans un creux du rocher, en haut au col... mais pas question de laisser mon vélo en chemin ! la preuve mon bidon.... tout ragaillardi j'attaque donc de nouveau l'ascension à pied cette fois (il ne faut pas être trop provocateur!) et puis j'aurai ainsi plus de chance de retrouver ma chaussure qui compte aussi. Peu après je la retrouve à 2 m du sentier. Je retrouve aussi mon bidon à l'endroit où j'avais caché mon vélo... Mais ce bidon, je le laisse dans un trou de marmotte je tiens à préserver ma défense ! j'arrive au col, pas de garde à l'horizon... ouf ! je prends une photo du lac avec mon vélo, discute un peu avec des randonneurs et repars... comme un voleur ! Bernard MIGOT N°844 de La FLECHE (Sarthe) |