J'ai franchi mon premier col en 1953, et je me suis demandé si un col avait cette altitude. Le Chauvot en propose un seul, en Isère et en regardant la carte, il se trouve dominer le sanctuaire de Notre-Dame de la Salette, j'ai cité le col de l'Eterpat. C'est décidé, je prendrai congé le jour de mes 50 ans pour aller gravir ce col. Le 26 mai 2003, la météo est mauvaise en Rhône-Alpes mais je pars tout de même de ma Haute-Savoie pour la Salette. Chemin faisant, je découvre le col d'Ornon 1371m (38-1367), le col de Parquetout (38-1398m) mais le va-et-vient des essuie-glaces me rend inquiet pour ma randonnée VTT. J'ai doublé un cycliste dans la bruine entre Corps et la Salette où je dépasse les cols des Prés Salés (38-1554) et de l'Homme (38-1650) que j'avais prévu de gravir en vélo depuis Corps (14,5 km) si le temps l'avait permis. On se retrouve au sanctuaire où je suis en train de préparer mon vélo et de tester l'étanchéité de mon vêtement de pluie. C'est le cuisinier de l'établissement qui vient au travail en vélo. Nous échangeons quelques mots mais il ne peut pas me renseigner sur le col. Je vais au bâtiment d'accueil et on est surpris de voir un cycliste demander le chemin du col de l'Eterpat, à trouver dans le brouillard. J'emprunte la promenade pavée qui part près du sanctuaire, d'une source aménagée en bassin pour les pèlerins. Je grimpe le sentier qui indique le col de l'Eterpat en suivant l'altimètre mais je dépasse les 1953 mètres sans voir le col dans la poisse. En montant, je dépasse les nuages et ma foi, à défaut de col, la vue est jolie. J'ai l'habitude lorsque j'hésite entre deux chemins de prendre celui qui monte le plus et cette initiative du guidon m'a éloigné du col lors de l'ascension. Je retrouverai le col à la descente avec la carte. |
Je pousse le vélo plus que je ne roule et ce sont les escargots qui montrent leurs cornes et pas les bouquetins, chamois ou mouflons. Je continue mon ascension et me retrouve au mont Gargas, 2207mètres. Tout le massif des Ecrins m'entoure, c'est magnifique pour mon anniversaire, ce panorama au dessus de la mer de nuages, les sommets sont encore enneigés fin mai. Je téléphone ma joie à ma famille car si les vallées ne laissent pas passer les appels des portables, au mont Gargas, on peut appeler Saint-Jorioz. Je trouve le col de l'Eterpat à la descente, comme en 1953. Quoi ! le panneau indique 1954 mètres, ce n'est pas vrai. Mes lunettes sont pleines de gouttelettes de buée mais je n'ai pas la berlue. Pas une pelle dans les parages pour creuser un mètre ! Je me réconforte en me disant que pour les Cent Cols, c'est toujours le Chauvot qui a raison. J'ai pris un jour de congés, traversé trois départements sous la pluie, roulé des centaines de kilomètres, je suis venu gravir le jour de mon anniversaire dans le brouillard un col de 1953 mètres, il est donc à 1953 mètres. Une réflexion altruiste m'a fait penser que la nouvelle peut intéresser les Centcolistes de 1954. Quoiqu'il en soit, il me faut redescendre de mes nuages. La descente se fait mieux en VTT, je glisse jusqu'au sanctuaire. Parvenu à La Salette, l'hôtesse qui m'avait indiqué le chemin, endossant ainsi une charge morale, a été rassurée de voir revenir le fêlé parti seul en VTT dans le brouillard. Notre-Dame-de-la-Salette a vu passer des millions de pèlerins depuis plus de 150 ans, mais celui-là avait son originalité. Je choisis dans la boutique une croix en émaux pour le souvenir. J'ai visité ensuite l'intéressant musée du sanctuaire en bénéficiant d'explications individuelles d'une hospitalière belge. J'ai retrouvé devant les marches de l'église de la Salette le fourgon des cloches Paccard, entreprise établie près de mon domicile, je l'avais doublé sur l'autoroute. L'employé est venu réparer le carillon du sanctuaire qui sonne aujourd'hui pour mes 50 ans. Bernard Corbet CC n°5364 |