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Semaine Internationale

Revue N° 08 Page 42

Si au cours d'un brevet vous êtes tombé sur un contrôleur se prenant un peu trop au sérieux (c'est rare, mais ça se voit un peu de plus en plus), si, par exemple, on vous a fait partir en ligne pour faire comme si on était venu là pour faire la course, si vous vous êtes senti un peu perdu parmi un développement incontrôlé de vélos super-légers, étalage de pommades et autres voitures suiveuses.
Si, en un mot, vous vous êtes demandé à l'occasion d'un brevet dit “cyclo” ce que vous étiez venu faire là :

Allez à une semaine internationale :
- Alors là c'est le vrai bonheur,
- Le vrai bonheur cyclo.

Vous arrivez dans une capitale, telle que Luxembourg, des petites flèches extrêmement discrètes, sinon manquantes, vous indiquent la direction du lieu de rassemblement international.
Vous arrivez sur le lieu, pensant qu'en même temps il y a un petit brevet régional partant de là et que le grand rassemblement international est quelque part plus loin.

Mais non : c'est bien l'à.

On ne parait pas être des milliers.

Vous entrez donc dans une petite salle à la table classique, derrière laquelle se trouvent de tout à fait charmantes dames souriantes.

Et un cyclo vous accueille personnellement, si bien, si gentiment, que l'on arriverait à être convaincu que l'on se connaît depuis bien 30 ans, sinon plus, que l'on a été à l'école ensemble, et que nos familles n'ont passé leur temps qu'à se connaître.

Imaginons que vous pensiez à cet instant, qu'il n'y a pas assez de monde pour vous, pas assez de bruit, de micros, ou autres rigolades, et que vous vouliez rentrer chez vous.

Pas moyen.

Car le coup de la famille, vous avez compris c'est la grande famille cyclo.

Et là le bonheur commence.

Tout le monde a le sourire, on apprend que l'on est un peu plus de 200, sans plus, de là à penser que l'on représente l'élite internationale, il y a l'épaisseur d'un pneu.

Un “100 cols des Vosges” est là, souriant, bavarde et donne, deux, trois renseignements, gentiment, tranquillement, que c'est donc sympa, que l'on commence donc à être bien.

D'ailleurs, tous vous renseignent, bavardent, vous dépannent.

Ma femme et moi, sommes logés dans le 1/4 d'heure qui suit cette première entrevue.

Et le lendemain, muni du petit carnet indiquant les circuits de la semaine, j'arrive à l'heure de départ : 9 heures, comme indiqué.

Nous sommes quatre ou cinq, déjà souriants, innocents, ignorants.

Ignorant que l'heure de départ indiquée, ne veut rien dire du tout, que ça peut être l'heure d'arrivée pour ceux qui aiment partir la nuit et profiter de l'aube, pour ceux qui peuvent avoir autre chose à faire dans la journée. On peut donc partir plus tard et revenir quand on veut.

C'est le bonheur qui continue, et on n'a pas encore tout vu à ce sujet.

Enfin, on prend donc la route sur laquelle se pratique un seul langage international, le sourire, toujours le sourire.
On peut être doublé : ce sont des saluts, avec le sourire, On double : c'est encore salut et avec le même sourire,

On peut croiser, on fait le circuit dans le sens que l'on veut, et c'est toujours et encore le même merveilleux sourire.

Le sourire heureux d'être là, d'être cyclo, d'être sur la route, d'avoir un beau soleil, une pluie bien sympa, d'avoir la chance unique de croiser l'ami de toujours.

Les vélos en rigoleraient, pas un qui ne ressemble à l'autre, des vélos, solides et marrants, correspondant chacun au caractère de leur propriétaire, certains portent la théière anglaise, d'autres supportent des athlètes qui se jouent et s'amusent avec les bosses des Ardennes.

Et toujours, sourires, saluts et joie.

Vous bouclez votre circuit tranquillement, vous faites part de votre satisfaction à l'arrivée. Il vous est répondu avec le plus grand naturel, et toujours le sourire, “N'est-ce-pas qu'il était beau, bien composé le circuit que nous vous avons proposé”, nous roulons tellement “pour nous” que nous connaissons bien toutes les routes. Si ça vous a plu, c'est qu'il ne pouvait en être autrement”. Et voilà donc, comment tout le monde est heureux.

Et dans tout cela : pas de contrôle, ni au départ, ni pendant, ni à l'arrivée.

Pas de contrôle, puisque c'est la semaine internationale de l'amitié, de la gentillesse et de la liberté.

Pas de contrôle, puisque vous êtes venu pour être heureux, vous laisser aller au détour d'un chemin, à la terrasse d'un bistrot au soleil, vous laisser rêver sur une petite place rigolote, vous arrêter sous le haut plafond d'une forêt monumentale et qu'une friture de la Moselle c'est toujours bon à prendre . . .

On ne fait pas du vélo, on plane.

Si à un moment, vous sentez une petite fatigue, il n'y en a que pour quelques minutes, puisque vous allez être doublé, ou croisé, par des saluts et que donc : vive la route et que ça continue.

Que l'on est loin de ces pseudo-sporto-cyclos sérieux, qui ne vous connaissent pas et ne veulent pas vous connaître. Pas de ces airs concentrés, inquiets du départ, inquiets du chrono, inquiets de ce que l'on peut dire d'eux.

J'oubliais : ne soyez pas en panne, car s'il y en a quinze qui passent, ça en fait quinze, pour vérifier que vous êtes capable d'en sortir, et qui vous demandent si vous n'avez vraiment besoin de rien. Vous êtes donc contraint, par une gymnastique appropriée, et internationale, à bien faire comprendre qu'en ce qui vous concerne, vous n'en êtes pas à votre première crevaison, que tout va bien, que vous êtes heureux d'avoir crevé, donc sourire et encore sourire.

C'est donc bien la semaine internationale du bonheur, de la joie et à la rigueur du cyclotourisme.

Un souvenir qui marque dans une vie.
Merci Monsieur et Madame Olinger et tous les autres organisateurs, participants. Merci, aux deux Japonais qui m'ont invité au Japon pour l'année qui vient.
Merci et merci.

Et si tous les cyclos du monde...

Jean BALME

DIJON (21)


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