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En pays cathare ... Les Gorges Audoises

Revue N° 08 Page 48

Serge avait remarqué dans la revue de la Fédération, l'annonce de la 4ème Randonnée des Gorges Audoises à Limoux, dans l'Aude et surtout le passage d'un col de 2 001 mètres, une aubaine à un mètre près pour les membres du Club ces “Cent Cols”.

Demande de renseignements complémentaires et décision arrêtée. Départ de la capitale le vendredi soir, une nuit dans le train, samedi matin, à Toulouse, récupération de la bicyclette et 100 kms de promenade pour rejoindre Limoux.

Mais, ce samedi 30 juin à Toulouse„ une déception attendait Serge : la bicyclette n'avait pas suivi ! Comme toujours les préposés de la SNCF, très encourageants, ne garantissent rien : "peut-être dans la journée, ou demain ...”.

Une telle déception vous décourage même de faire une visite rapide de la Cité des Violettes, et vous préférez rester dans la bien nommée salle des pas perdus, à attendre et à ronger votre frein. Mais il y a un Saint Christophe pour les cyclos à la SNCF, et en fin de matinée le vélo arrivait. Il parait alors, plus sage de rejoindre Limoux par le train (en surveillant embarquement et débarquement de la bicyclette).

Petit problème de logement dans cette petite sous préfecture, puis visite de la ville : sa place avec ses “couverts” et ses façades anciennes, sa Collégiale Saint Martin, son Musée Pétiet consacré à la Belle Époque, ses vieilles rues aux noms évocateurs : de la Carasserie (nom de radeaux de bois qui descendaient l'Aude), des Oules (marmite de terre cuite), de la Fusterie, de la Goutine, le contact avec l'habitant à l'accent rocailleux, intarissable sur le Carnaval aux traditions très anciennes et typiques, les spécialités culinaires locales : le nougat, les fogassets al pèbre ou prébradou (gâteau au poivre pour l'apéritif) mais surtout la Blanquette de Limoux., sans doute le vin effervescent le plus vieux du monde (En 931, déjà Limoux protégeait ses vins par décret).

Le dimanche matin, vers 6 heures 30, sur la promenade du Tivoli, les participants de la Randonnée se retrouvent sous un ciel mi-figue mi-raisin. De petits groupes se forment et se mettent en route vers Alet Les Bains. Comme dans toute randonnée, on fait connaissance pour être séparé un peu plus loin et bientôt se retrouver. Le parcours remonte la Vallée de l'Aude vers le sud. Après quelques kilomètres dans les vignobles, une première trouée dans le, relief : l'Étroit d'Alet, gorges peu profondes, très agréables. Alet Les Bains, un haut lieu de prières dans l'histoire locale, contourné par une récente déviation permettant une belle vue d'ensemble des ruines d'un évêché des XI°, et XII° siècles.

Peu après Serge remarquera sur un piton, Rennes Le Château dont on lui a raconté, hier soir, la légende du curé au trésor. A Couiza, voici le château renaissance des Ducs de Joyeuses.
A Campagna, par un pont pittoresque, nous prenons une petite route épousant le tracé de l'Aude sur les bords de laquelle les pêcheurs de truites sont nombreux.

Quillan, dans son cirque de petites montagnes accueille les cyclos qui vont, peu après arriver à l'entrée des Gorges de la Pierre Lys, par le célèbre Trou du Curé. C'est un impressionnant défilé aux parois blanches et verticales, avec l'Aude bouillonnante quelques mètres en-dessous de la route.

Nous allons commencer la montée de la Haute Vallée de l'Aude, et dès après Axat, voici les Gorges de Saint Georges. Certes, elles ne sont pas très longues, mais vraiment très étroites et étonnantes. La lumière permet juste réaliser une photo d'un petit groupe. Maintenant ce petit groupe dans lequel Serge s'est intégré remonte le cours de l'Aude devenue torrent, dans une vallée parfois étroite, sombre ou au contraire élargie avec des versants aux épaisses forêts de sapins et de hêtres. Plusieurs petites usines hydroélectriques plus ou moins intégrées au paysage, un élevage de truites avec pêche organisée “prise garantie”.

Quelques “régionaux” indiquent que nous approchons du Mur de Carcanières dont Serge a déjà entendu vanter les pourcentages hier soir. Après un petit chalet de campagne baptisé “le Ranch des Fées”, nous arrivons aux Bains de Carcanières et d'Escouloubre, deux petites stations à clientèle très régionale mais combien attirantes par leur quiétude. Un petit pont à droite et nous abordons le fameux mur. Immédiatement, ceux qui ont trop attendu pour passer un très petit braquet sont bloqués et certains doivent mettre pieds à terre dans les plaintes de chaînes et de roues libres.

Pendant quatre kilomètres il va falloir grignoter une pente très rude qui va nous faire sortir de la vallée. La température n'est pas très chaude mais bientôt les gouttes vont tomber de tous les visages. Certains montent cette rampe avec énergie (ne le regretteront-ils pas tout à l'heure ?), d'autres au contraire préfèrent dès maintenant utiliser un petit braquet (les 30x24 ou 26 ne sont pas ridicules).
En sortant de la vallée les cyclos vont être déçus car ils peuvent apercevoir que la montagne vers laquelle ils se dirigent est perdue dans le brouillard. Pour l'instant, il faut arriver au premier contrôle, au village de Quérigut.

A ce contrôle, les conversations portent sur la pente que l'on vient de passer mais aussi sur le Col de Pailhères que l'on va aborder. Il est aussi question des Cents Cols, des Cols durs dont le responsable de l'U.C. Toulouse se trouve justement dans le groupe de Serge. Le léger ravitaillement offert par les organisateurs permet de refaire quelques forces, mais on s'inquiète aussi de trouver une épicerie.

Une descente de trois kilomètres, et commence le montée du Col de Pailhères. Mijanès, un petit village de montagne est traversé lentement et on pénètre dans le Cirque de la Forêt des Hares d'où coule la Bruyante la bien nommée car l'on n'entend que le bruit de ses eaux. Malheureusement, les cyclos se rapprochent du brouillard et bientôt la vue sera nulle. La montée paraîtra longue à Serge, d'autant qu'une pluie fine va se mêler au brouillard et le vent froid soufflera de face assez fortement. De temps à autres les sonnailles de troupeaux de vaches viennent troubler le silence ouaté du brouillard.

Le Col de Trabesses, marchepied du Pailhères, passera inaperçu et enfin le sommet venté et froid du Col est atteint. Pas question de s'attarder, il faut mettre tous les vêtements disponibles et entamer la descente.

Cette descente sera pour tous les participants un mauvais moment : visibilité presque nulle mais surtout pluie et vent très froids. Nombreux furent ceux qui durent s'arrêter ou pour marcher un peu pour se réchauffer, ou simplement, parce que les doigts gourds ne pouvaient plus freiner.
Bientôt les nuages seront passés et la descente moins pénible.

A Lavail, virage à droite et tout de suite attaque des premières pentes du Col du Pradel.
Si presque tout le monde fut heureux de retrouver une montée pour se réchauffer, certains payèrent les méfaits du froid. Serge trouvera un gars en butte avec un estomac fâché et le faisant savoir, un autre assis au milieu de la route avec les jambes raidies par des crampes. Heureusement quelques soins, un peu de repos et ces misères s'effacent.

Serge continue son ascension du Col du Pradel, route assez abîmée avec de courts passages très sévères, mais dans une belle forêt avec des trouées permettant de belles vues sur les Pyrénées.
Vers 1300 m, à nouveau le brouillard fait son apparition, moins épais que le matin mais surtout moins froid.

Au sommet, les organisateurs ont prévu un ravitaillement sous forme de grillade de saucisses avec du pain frais et naturellement, biscuits, sucre, pâtes de fruits etc ..., le tout arrosé, pour ceux qui le désirent, du bon vin du pays. Chacun reçoit même un journal pour glisser sous son vêtement.

Malgré le froid et le temps assez mauvais, grâce à la chaleur des quelques feux allumés çà et là, mais surtout, certainement à celle de l'accueil, nombreux sont les cyclos à s'attarder à ce contrôle.

Il ne reste plus, maintenant, à Serge, qu'à se laisser glisser jusqu'à Limoux. Dès le début de la descente, surprise, le temps se dégage et devient ensoleillé.

Par une petite route très tourmentée, mais en excellent état, on traversera la Forêt de la Fajolle, avec deux arrêts pour croiser deux troupeaux de quelques vaches, puis le village la Fajolle., contrôle B.C.N. ou B.P.F. pour certains, et commence la Vallée du Rébenty, gorges magnifiques, très sombres, tunnels, ou cirques pleins de lumière en particulier celui de Joucou.
Bientôt un petit groupe d'une douzaine de participants se constituera et l'allure s'accélérera. Le retour va se faire à un rythme assez rapide mais qui reprochera à ces cyclos de faire encore un peu de sport après avoir, en touristes, durant toute la journée, profité de paysages nouveaux. Serge à l'arrivée sera très heureux de pouvoir acquérir la médaille souvenir de la Randonnée et de recevoir en outre, une médaille frappée par le Club organisateur à l'occasion de son cinquantenaire.

Mais il faut songer à quitter cette ambiance, tous ces amis nouveaux, d'autant que Serge a l'intention de rejoindre à vélo, Carcassonne où en fin de soirée il reprendra le train de Paris.

Jean COUDERC

LIMOUX (11)


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