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Au soir d'un centième col

Revue N° 15 Page 6

Dans l'éblouissement du Marchairuz paré de sa première neige, Jeanne tu as gravi la route rude qui t'ouvrait la porte du " Club des 100 cols ". C'était le 26 octobre de l'An 86.

Cent cols...Jamais Jeanne tu n'aurais imaginé, lorsqu'un beau jour de juin tu attaquais Richemont - ta première conquête - Jamais tu n'aurais pensé qu'à peine quatre mois écoulés, les roues de ta randonneuse auraient dévoré cent cols.

Ces roues, c'est toi Jeanne qui leur a donné la vie. Toi la petite bonne femme, la " squaw du vélo ", tu as voulu et, pour ce faire, tu as jeté à tous les vents, énergie, volonté, persévérance, humilité et courage. Et quel courage !

Atteinte de cette merveilleuse maladie qu'est la " colite ", tu as escaladé...escaladé, tout au long d'un bel été. L'automne venu, le bilan est là : cent cols ! Les uns aux noms prestigieux : Croix de Fer, Galibier, Furka, Oberalp...Même le Ventoux - qui te narguait si bien - ne t'a pas résisté. D'autres moins connus, mais peut-être plus encore redoutables, t'ont fait passer, par delà les montagnes, de vallées en vallées. Tous t'ont apporté l'infini plaisir. Celui d'être " là-haut ". Tu as découvert l'Arpettaz, Fontaube, le Grand Taillet et d'autres...d'autres. Un jour, dans l'un d'eux, tu as terriblement souffert. Ta vengeance ? Tu y es remontée... et de belle façon !

Tu as vu Plan Lachat, Plan Dernier, le Plan de la Laie. Tu as mangé des yeux Roselend, la Pierra Menta et la merveilleuse Engadine...

C'est bien Jeanne...tu as réussi.

Mordue par le froid, dans la descente de ton centième col, tu pensais au soleil de feu qui t'étouffait dans les derniers lacets de la Croix de Fer.

Quelle aventure ! ...

Une aventure que ceux qui restent " en bas " ne peuvent comprendre. Tout l'enchantement de ces premiers cent cols, sont maintenant des souvenirs. D'autres viendront qui cascaderont en toi comme cascadait un jour le fougueux torrent du Glandon.

Mais moi Jeanne je sais. Parce qu'avec toi, j'ai grimpé ces cents cols. Tu as eu la belle gentillesse de me dire : " C'est grâce à toi si j'ai fait ça... ". Merci Jeanne. Mais, vois-tu, c'est surtout grâce à toi-même. Et puis, tu le sais, pour nous, les " gens d'ailleurs ", peu importe les louanges. Seule compte la joie du cœur . C'est une très jolie fleur. Comme cette petite marguerite solitaire qui, un jour d'octobre, avait poussé prés de la vieille borne marquant le col des Arces. Une petite marguerite solitaire qui aura été pour toi la plus magnifique des gerbes. Ces gerbes que d'autres reçoivent - pour pas grand chose trop souvent - mais que toi, tu as tant méritée.

C'est bien Jeanne...

Ton vieux " Prof " savoyard est satisfait car il t'a permis de découvrir les pays où " les poules picorent les étoiles "...

Des pays, des routes, des instants que jamais tu ne pourras oublier...

Paul Maillet

C.T. Chambériens
Bellegarde, Ain


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