L'équipement du cyclomuleteur

La pratique du cyclomuletier est devenue à la mode. Il a plutôt un regain d'intérêt, car la passion de parcourir la montagne à vélo, nos aînés l'avait déjà...

Sur le plan technique, l'évolution de la bicyclette ne permet plus d'accéder aux pistes des alpages dans de bonnes conditions.

Après 10 ans de pratique, mon expérience, alliée à mon métier d'artisan-constructeur me conduit à ces quelques suggestions sans prétention.

Il faut considérer 2 cas : le cyclomuleteur " occasionnel " et celui qui en fait une activité importante.

Le premier n'aura pas besoin d'un matériel super adapté, il lui faudra malgré tout respecter ces règles élémentaires :

Développements très inférieurs à ceux employés sur la route (il faut mouliner pour éviter de se mettre en danseuse) ;
Pneus de section un peu plus forte afin d'amortir au mieux les vibrations ;
Prévoir deux ou trois bidons, l'eau potable est rare en montagne ;
Les gardes-boue sont conseillés, à condition que, malgré les pneus plus gros, ils laissent suffisamment d'espace pour ne pas trop " garder la boue " ;
Eviter de trop charger la sacoche de guidon, la maniabilité du vélo, surtout à basse vitesse, est très sensible à cette charge ;
Utiliser un porte-bagages AR pour les choses encombrantes (pull, chaussures, etc...) ;
Vérifier l'état des freins avant le départ de telles randonnées n'est pas superflu.

Avec un petit " coussin " pour le portage éventuel du vélo sur l'épaule, les cartes IGN au 25 000 et un altimètre, vous êtes prêts pour effectuer de bien belles randonnées.

Mais si vous faites partie de ces " collectionneurs " de cols muletiers, il sera souhaitable d'avoir un matériel bien adapté :

Un cadre léger et solide, ce qui paraît un compromis impossible. Je pense malgré tout que seule la fourche demande à être renforcée, les pneus de forte section amortissant la plupart des vibrations, ne choisissez pas des tubes trop lourds.
Choisir ce cadre un peu moins haut que de coutume, l'utilisation sera plus aisée et il suffira de laisser dépasser la douille de direction de 2 à 3 centimètres au-dessus du tube horizontal pour obtenir la position initiale. On peut prévoir sur ce cadre une poignée de portage, tube cintré au niveau du dérailleur avant et reliant le tube de selle au tube diagonal. C'est bien plus pratique que le traditionnel arceau de portage sur l'épaule... 13 à 15 kg, c'est parfois lourd...
Le freinage est important, les freins Shimano Cantilever Deore XT semblent être la fabrication et l'efficacité la plus sérieuse. Il y a aussi le MAFAC " RAID " sur lequel il faut apporter de multiples modifications. Ces freins sur jantes associés à un freinage sur le moyeu avant (tambour) donne un résultat tout à fait satisfaisant dans la descente des sentiers...

Les pneus, autre point délicat. Avec 650 B, les récents Wolber pavés (35 sont intéressants : une bonne chape mais, et c'est dommage, une carcasse un peu fragile. Toujours en (35, Barum propose un excellent pneu : toile et chape très résistants pour un poids de 700 g contre 500 au Wolber. Chez Wolber, il y a également un 650 " renforcé " de (45. Tout noir, avec une chape à profil pavé et une carcasse très solide. Je leur préfère les 26 pouces Michelin Hilite express : excellent compromis route et sentier, carcasse très solide, pliable et d'un remarquable poids léger : 410 g. La section de 38 mm semble être une bonne solution et le diamètre 26 pouces, plus petit que 650, permet de rigidifier les roues. Les jantes ne devront pas être trop larges pour laisser aux pneus leur fonction de protection latérale.
Les dérailleurs seront très sollicités : évitez les grands écarts de dentures au pédalier afin de ne pas être contraint à opter pour des mécanismes grandes chapes. Ces dernières sont trop fragiles en tout terrain. Les manettes au guidon sont bien pratiques.
Les gardes-boue sont nécessaires. Je regrette simplement leur forme trop enveloppante latéralement, il est nécessaire de trop " décoller " le garde-boue du pneu afin de laisser un espace important. Il faut alors mettre des gardes-boue " 700 " sur des roues " 650 " afin que les formes s'épousent. De toute manière, il sera souhaitable de relever au maximum la tringle du garde-boue AV : je connais plusieurs cyclos qui ont effectué le saut périlleux après qu'une pierre ou qu'un morceau de bois se soit coincé entre les rayons et la tringle. C'est imparable, j'en ai fait la cruelle expérience dans l'ascension du col de Valbelle. Bien entendu, ce garde-boue AV ne devra pas entrer en contact avec le cale-pied avant, ou du moins pas trop franchement !
Les pédales ? Tout un problème : la bonne solution semble être le modèle à plate-forme pouvant être utilisé efficacement avec des chaussures de marche. Il y a la Campagnolo triomphe (trop cher), la MKS 707 (introuvable en France) et la Shimano PD 100 (pas encore importée). J'ai personnellement opté pour la Shimano Deore : une large plate-forme qui est située dans l'axe de la manivelle, ce qui permet d'abaisser cadre et selle de 2 cm, c'est intéressant lorsque l'on monte et descend du vélo tous les 50 m comme c'est le cas sur un sentier. De plus, elle ne " griffe " pas trop les mollets...
Il faudra privilégier la maniabilité du vélo, et pour cela, la chasse ne devra pas dépasser 50 mm. La répartition du poids, par 4 petites sacoches situées au-dessus du moyeu AV et juste sous la plate-forme du porte-bagages AR, donne de bons résultats.
La pompe pourra être fixée sur le porte-bagages AR ou derrière le tube de selle, et les portes bidons pourront être du type " novelfix " orientables à souhait.

Mais les cyclomuleteurs auront toujours du mal à trouver un matériel bien adapté.

Ils sont des marginaux et n'intéressent pas les constructeurs d'accessoires qui souhaitent, à juste raison, une grande diffusion.

Il nous restera ces images inoubliables de telles randonnées : le Grand Col, le Mont Jovet, les cols du Palet, de la Rochenre, de Sollières, le Sommeiller, le Passo della Longia, le Pic de Chateaurenard, les Monts Chaberton et Jafferan pour ne citer que quelques exemples.

D. Cattin

C.T. Grenoble