J'ai lu avec attention l'article de Georges Fonta intitulé " Club des Cent Cols. A vélo, avec le vélo ou à pied ? Me sentant concerné par les réflexions développées, je ne peux résister au besoin d'argumenter à mon tour : après tout, notre revue n'est-elle pas ouverte aux courants d'idées les plus divers ? peut-être plus encore en cette année du Bicentenaire ! Comme lui, j'admets que rechercher systématiquement les cols à plus de 2000 mètres n'est pas très sain s'il s'agit de vouloir, par tous les moyens, grossir son quota dans le but (avoué ou non) de se hisser dans le classement afin d'obombrer les petits copains. Cela révèle une pratique plutôt douteuse qui, cependant, me laisse parfaitement indifférent. " A chacun ses sales goûts " comme le dit ma vénérée mère ! Par contre, essayer de résumer toute la philosophie cyclomuletière en ce simple postulat, me paraît, à tout le moins, quelque peu spécieux. Aussi, ne le suivrai-je pas sur le terrain scabreux (même si c'est le propre des chemins muletiers) qui consiste à ne voir dans les amateurs de parcours difficiles que des obsédés du meilleur classement à tout prix ! Il existe, en effet tant de raisons bien plus honorables de se lancer à l'assaut des sommets (qu'ils soient ou non à plus de 2000 mètres) N'ayant pas la prétention de m'exprimer au nom de la majorité des cyclomuletiers, c'est mon expérience qui servira de fil conducteur. Je suis d'autant plus à l'aise pour en discuter que je ne totalise que 96 " plus de 2000 " (la plupart routier). Je dois d'abord signaler que mon vélo, randonneur 650, 700 ou V.T.T. est une seconde peau : donc pas question de m'en séparer. La montagne me fascine, ce qui m'incite à essayer de la pénétrer et si pour ce faire, il faut gravir un col à plus de 2000 mètres, en dehors de toute voie carrossable : et bien tant mieux ! Là au moins, je suis assuré de ne pas y rencontrer d'automobiles ou de motos dites vertes. Etre obligé d'emprunter un G.R. ne me dérange nullement. Le randonneur pédestre chevronné dispose souvent d'un sac à dos chargé ; pourquoi ne pourrai-je pas porter ma monture lorsque cela devient nécessaire ? |
Pousser, porter, exige effectivement un effort physique exacerbé par la précarité de certains passages. Peut-être est-ce un paramètre majeur de cette recherche inconsciente du " dépassement de soi " ou l'une des dominantes essentielles de la " conquête de l'inutile "... Toujours est-il que la fatigue corporelle inhérente ne peut, que sublimer l'investissement de la crête sommitale. Quelle joie, une fois le but atteint, de pouvoir repaître ses yeux de paysages superbes que l'on se hâte de fixer sur la pellicule avec souvent, en premier plan, ce vélo complice qu'on se refuse à considérer comme un vulgaire tas de ferraille encombrant. De surcroît, le cyclomuletier a un avantage indiscutable sur le randonneur pédestre. En effet, généralement, ce dernier est obligé, faute de temps de rebrousser chemin pour récupérer son véhicule, alors que le cyclo va poursuivre sa route vers d'autres horizons, grâce justement à son engin qui retrouve toute son utilité, une fois le sentier meilleur. Ce que du reste admettent et envient ces même pédestres lorsqu'on leur explique la raison de cet équipage qui les surprend de prime abord. Je n'ai pas écrit ces quelques lignes avec l'intention de convaincre qui que ce soit, mais pour définir quelle était la motivation d'un " amoureux " inconditionnel de la montagne. En fait, somme toute, cette motivation ne serait-elle pas l'expression inconsciente d'un trait de caractère qui me pousse, entre autres, à ne pas me contenter de rester dans le rang des " puristes " ? en quelque sorte un refus de la normalisation et l'envie impérieuse d'être libre ! De toutes façons, " si je randonne par monts et par vaux, c'est la faute à Chauvot " ! Dans sa bible, qualifiée " d'œuvre très complète " par G. Fonta lui-même, les muletiers ne sont-ils pas une invitation à sortir des sentiers battus... à vélo, avec le vélo et à pied ? Jean Jacques Laffitte 79000 Niort |