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Légende indienne

Revue N° 22 Page 25

Un chasseur cyclotouriste de la tribu du CT CALADOIS avait établi son wigwam sur les rives sud-ouest de la rivière Rhône, près du grand village LYON. Il s'appelait Meeji Geeg Wona, ce qui signifie Aigle Gris dans le langage de l'homme blanc.

Ce nom lui avait été donné en raison de sa passion pour tout ce qui vole et aussi de la couleur de ses cheveux. Depuis longtemps, par obligation car loin de sa tribu cyclotouriste, il chevauchait seul sa bicyclette, sans regret, car pensait-il, mieux valait qu'il soit habitué à vivre comme l'ours solitaire lorsque viendrait le jour où il devrait rester dans son tipi, n'ayant plus dans son corps le feu sacré de la jeunesse, ses cheveux devenus tout blancs et son visage aussi glacé que celui de Peboan, le bonhomme hiver. Respectueux des lois et des coutumes de son peuple il n'omettait jamais de saluer ses frères cyclotouristes lorsqu'il les rencontrait au cours de ses chevauchées solitaires.

Mais plus le temps passait, moins ceux-ci lui répondaient. La plupart fuyait les coutumes ancestrales. Leur monture n'avait de bicyclette que le nom et n'étaient pas faites pour les longues chasses par tous les temps. Ils portaient souvent les couleurs de totems inventés par l'homme blanc pour copier le peuple indien (le castor Hâma, le Rat Leigh...). Ils ne savaient plus voir, sentir, entendre. Ils se déplaçaient le visage collé à l'encolure de leur monture.

Meeji Geeg Wona comprit alors que ne pouvant avoir le réconfort des frères de sa lointaine tribu, il lui fallait porter son regard ailleurs. Jeune chasseur, il avait appris à conduire ces étranges machines inventées par l'homme blanc pour imiter les oiseaux. Avec elles il était monté aussi haut que l'aigle son totem. Avec elles il avait plongé au coeur des vallées, sauté les montagnes. Comme, de ses vols anciens, il avait gardé l'envie d'aller toujours plus haut, il aimait rouler vers les sommets. Il apprit un jour que, petit à petit, comme Peepi Geeg Zains le faucon lorsqu'il construit son nid, il avait très largement, et sans le savoir, sacrifié au rite initiatique d'une étrange tribu, celle des "CENT COLS".
Ses lois, lui dit-on, étaient simples et belles : être honnête, respecter et aimer Mère Nature, toujours saluer le frère que l'on rencontre au cours d'une chasse et dire chaque année aux anciens ce que l'on avait accompli. Les sages de cette tribu l'admirent parmi eux. Ce jour là, Meeji Geeg Wona sut que dans son coeur et dans son esprit il ne serait plus jamais seul lors de ses longues randonnées, même s'il se permettait de transgresser la dernière règle refusant tout esprit de lutte avec ses frères, il ne communiquerait jamais son tableau de chasse. De même, il renonça aux chasses muletières: a-t-on jamais vu un guerrier porter sa monture ?...!

Avait-il tort? Il n'a pas trouvé la réponse mais quand au cours de ses chevauchées, le vent et les arbres lui parlent, ils lui disent qu'il fait partie d'une tribu où chacun respecte l'autre et où règne un lien plus fort que celui du clan: la passion de la bicyclette.

Frères de la tribu des "CENT COLS", si vous voyez, au cours d'une de vos randonnées, un aigle planer dans le ciel, saluez-le : c'est peut-être le totem de Meeji Geeg Wona qui vous apporte son amitié.

Jacques MSSAIGNE N°3462

CT Caladois (Rhône)


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