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Deux cyclos pour un labrador en Capcir

Revue N° 28 Page 38

Malgré une météo défavorable, mon ami Jean-Pierre, de Montpellier, passe me prendre à Perpignan à 5 heures. Il fait nuit et le ciel est couvert. Malgré tout, ayant prévu de grimper aux Camporells, nous nous dirigeons vers Formiguères, village en Capcir et point de départ de notre randonnée.

En arrivant à Montlouis, le brouillard s'ajoute au mauvais temps et le passage au col de la Quillane se fait sans visibilité. A ce moment-là, nous sommes perplexes, étant de nature optimiste, nous continuons en espérant un miracle. Nous avons eu raison, car au fur et à mesure que nous approchons, le ciel, balayé par un vent assez fort, se dégage de plus en plus et laissait présager une bonne journée.

Il est 7 heures lorsque nous enfourchons nos montures après une visite à la boulangerie. Contre toute attente, le soleil est là et bien là. Il faut savoir que les climats de la Cerdagne et du Capcir sont totalement différents. Comme nous passons devant les dernières maisons, en direction des télésièges, un labrador, très gentiment, s'invite à la balade, avec tant d'insistance et de détermination que nous n'osons pas le repousser ; c'est donc au rythme de ses halètements que nous allons effectuer la balade.

Après le passage de la Collade à 1995m, les premières voitures commencent à apparaître. Heureusement, un peu plus haut, une barrière leur interdisait d'aller plus loin. Après une raide ascension, nous arrivons en vue du site, et là, un autre problème se pose : un panneau oblige à tenir les chiens en laisse. Nous nous voyons mal maintenir ces 80 kg en roulant. Au refuge du Camporell et des Estanys du même nom, c'est un paysage féérique qui s'offre à nos yeux : l'étang aux reflets vert émeraude et les pics Peric, Moustier, Montanyette, en font un endroit très prisé des randonneurs. Sur place, une classe d'enfants part en promenade vers le pic de Moustier. En compagnie d'un congénère, notre ami canin s'offre un bon bain. A ce moment-là, nous pensons qu'il va rester avec les enfants, mais il n'en est rien : c'est avec nous qu'il a décidé de passer la journée.

Le but de notre randonnée est de prendre trois cols à plus de 2000m ; par une variante du GR, nous grimpons au col de la Montanyeta (2312m) et après un petit en-cas, nous redescendons vers le col de Fora de la Caixa (2335m), qui n'est pas très loin. Pour profiter du paysage, nous poussons un peu plus loin, puis nous revenons vers le refuge et nous nous dirigeons vers le 3 ème col en suivant le GR qui mène au lac de Bouillouses. En passant devant les Perics, nous savons qu'un col s'y cache, mais ce sera pour un autre jour. L'objectif aujourd'hui, c'est le col de la Balmeta (2118m). A hauteur de la Serra dels Alarlis, les nuages poussés par le vent s'engouffrent, ce qui nous obligea à nous couvrir. Puis le ciel se dégage tout aussi rapidement, laissant le soleil nous réchauffer à nouveau.
Il est midi lorsque nous arrivons à la cabane de la Balmeta. Le berger a laissé son chien attaché, mais nous décidons de manger au col afin d'éviter tout problème. En chien bien élevé, notre ami s'installe devant nous pour profiter de notre repas. Après manger, nous nous dirigeons vers un petit GR qui, à travers les rochers, doit nous mener aux Angles, station voisine de Formiguères. La première partie s'avère être du portage entrecoupé de poussages aisés, jusqu'à l'Estany de la Balcera. Là, pendant que Monsieur Labrador prend son bain - il adore ça - deux jeunes femmes tenant leur caniche nous renseignent sur l'état de la piste à venir. Après deux petites portions de portage, nous nous retrouvons sur une large route forestière qui nous conduit sur les hauteurs du village. En attaquant le goudron, nous devons ralentir pour attendre notre ami qui commence à peiner. A tel point qu'il saute dans la première fontaine et s'assoit avant de boire en nous adressant un regard de compassion. En attendant, nous nous offrons un rafraîchissement à la Casa de l'Ours, bar sympa du coin. Heureusement que nous restons en terrasse car après son bain, il vient tout naturellement s'asseoir sous la table, ce qui fait croire qu'il est à nous. En repartant, la route est descendante, et je profite du plaisir, jusqu'au moment où je m'aperçois que Jean-Pierre n'est plus derrière. Problème ? Je fais demi-tour quand il me rejoint :
"Tout va bien. J'ai trouvé une voiture pour le chien, car il n'en peut plus."

A ce moment-là, un 4x4 passe et nous entendons les aboiements de gratitude de notre ami.
"Comment as-tu fait ?"
"Je lui donnais de l'eau avec mon bidon, et ces gens se sont arrêtés pour me proposer un récipient - ils ont habituellement un chien avec eux. Comme ils se rendent eux aussi à Formiguères, je leur ai demandé d'emmener notre ami, leur expliquant qu'il nous suit depuis 7 h du matin à travers la montagne et qu'il est fatigué. Ils ont accepté."
A Formiguères, le couple nous attend pour libérer l'animal qui bave de joie en nous voyant, pour le plus grand bonheur de la dame qui se démène avec des serviettes en papier, limitant les dégâts. Jean-Pierre, pour les remercier, leur propose de prendre un verre et notre ami, au lieu de rentrer chez lui, vient s'installer bien sagement à nos pieds.
"Il vous aime bien !", nous dit la dame.

"Oui, mais il n'est pas à nous", rétorque mon collègue, un peu gêné du doute qui s'installe.
Au moment de partir, pendant que nous chargeons les vélos, notre ami se couche contre la roue et il faut l'écarter en lui faisant nos adieux avec un pincement au cœur.

Si vous passez à Formiguères et que vous avez la chance de le croiser, n'oubliez pas de le saluer pour nous, il est vraiment super...

Martial GARCIA N°3525

de PERPIGNAN (Pyrénées-Orientales)


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