La retraite et la liberté qui en résulte, quoi de plus agréable que d'aller partager avec le copain Claude, Alsacien d'adoption, la joie d'escalader quelques cols des Vosges pour améliorer notre palmarès. Au programme 12 cols au départ de Villé. Les quelques gouttes qui ont étoilé notre pare-brise ne stoppent pas notre ardeur. A l'assaut du "Kreuzweg", sous le regard de biches (Ah ! ces routes forestières interdites aux polluantes automobiles !) et sous une pluie diluvienne, nous persistons... au grand étonnement de Grenoblois (la France n'est qu'un petit village) rencontrés sous un immense parapluie et qui eux ont renoncé. Au "Champ du Fer" inutile de chercher la tour et encore moins d'apercevoir le Mont-Blanc, comme l'indique le "Guide vert"; un fog londonien nous sert de "doudoune". Qu'importe ! nous fonçons sur "Charbonnières" et la "Steige" suivis du "Hanz" et de "la Jalcée" pour déboucher au col de Saales. Il est presque 13h ; trempés jusqu'aux os, crottés comme des participants de Paris-Roubaix, la faim nous tenaille, mais oh la ! Réconfort, une splendide auberge marque la limite entre le Bas-Rhin et les Vosges. Après moult hésitations, poussés par la fringale, nous osons pénétrer dans ce somptueux établissement, en nous excusant de notre tenue et de notre état, sollicitant menue pitance à avaler rapidement dans un coin où nous ne gênerions personne et afin de nous éclipser promptement. Avec un large sourire comme billet d'accueil et beaucoup de compassion dans le regard en percevant notre état, notre hôtesse nous déclare : "Messieurs, non seulement vous allez pouvoir déjeuner normalement, mais vous ne pouvez pas décemment rester dans vos vêtements complètement trempés ! Faites un brin de toilette, donnez-moi vos affaires. Je vais les laver, les essorer et les passer au sèche-linge ; vous pourrez les récupérer après le repas." |
"Merci beaucoup, mais il ne nous est pas possible de pénétrer dans la salle de restaurant comme ça, le cuissard humide, sur vos magnifiques sièges en velours" interrogeons-nous. "Ne vous inquiétez pas, ils sont faits pour ça, nous répond-elle en nous tendant le menu, et nous conseillant celui du "braconnier" - tout un programme ! -". Ébahis avec l'ami Claude, nous obtempérons, prenant part au milieu de convives déjà installés, tels deux manants au sein d'une cour royale. Après avoir dégusté le pâté de lièvre, le filet de cerf aux bolets (il n'y avait plus de civet au grand désarroi du chef qui est venu s'excuser !) arrosés d'un Pinot noir ; au café, nos affaires pliées avec soin nous sont restituées pour affronter à nouveau les derniers grains sur le chemin du retour. Le bonheur ne venant jamais seul, sitôt le seuil franchi, accompagné d'un dernier sourire de notre charmante aubergiste le soleil revient... Il nous reste six cols à avaler... C'était à "l'Auberge de la Roche aux Fées", au col de Saales un 10 juillet 1999 avant un certain 12 juillet où se poursuivrait la bonne aventure de ce séjour inoubliable à Achenheim en Alsace. Michel MOUTON, N°4269 de ST MARTIN D'HERES (Isère) |