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Cinq cols pour un pèlerinage

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Rien de tel que le simple avis de naissance de quelques cols dans les collines des Coëvrons pour décider votre serviteur à enfourcher son vélo et partir à leur recherche.

Sillé-le-Guillaume paraît être le point de départ idéal. Comme, depuis le drame de Fyé, les routes de la Sarthe incitent à beaucoup de prudence, j'effectue une rapide reconnaissance des lieux. La D310 m'inquiète beaucoup et je préfère limiter les dégâts en démarrant de Rouessé-Vassé.

Au-delà du passage à niveau, l'ordinaire petite vicinale s'élève gentiment en direction de la lisière boisée couronnant la crête. En ce lundi d'octobre, si le temps n'est pas franchement hostile, il est loin du grand beau. Peu de voitures, quelques ramasseurs de champignons et de temps en temps le grondement des trains passant en contrebas, rompent la monotonie silencieuse de la montée.

Deux kilomètres, deux et demi peut-être, et voilà, à 230 mètres d'altitude, le col de la Vallée, deuxième col de la Mayenne après celui de St-Sulpice. La route forestière dite de la Grande Ligne semblant être la meilleure voie d'accès aux cols suivants, je reviens sur mes pas pour l'emprunter. Peu accidenté, le chemin pénètre dans la forêt, puis paraît prendre beaucoup de plaisir à suivre les ondulations du terrain. Le roux sombre des fougères tranche sur la verdeur des grands arbres, laissant entrevoir sur la gauche le gris bleuté de la haute vallée de l'Erve.

Sur la D103bis, la Croix de la Mare (273m), second col de la journée, n'est pas très éloigné de la Grande Ligne. Une bonne rampe bien franche, et ça y est ! Grossière erreur, je plonge sur Rouessé-Vassé et naturellement, il me faut regagner la dénivellation perdue.

De retour sur la Grande Ligne, je continue sous le couvert forestier, bien à l'abri du vent sévissant vigoureusement sur les portions découvertes. Un premier carrefour, puis un autre que je redoute, car il s'ouvre sur l'une de ces routes rouges dont j'ai une sainte horreur. Surmontant mon dégoût, je m'aventure sur la rutilante D304 et passe en force le col de la Galerie (258m). Rapide retour sur la Grande Ligne pour arriver en vue d'un beau plan d'eau de 45 hectares du centre nautique de Sillé-le-Guillaume. Les nuages échevelés traversant à toute allure le ciel gris se reflètent dans les eaux tristes du lac que les premières gouttes de pluie viennent troubler.

Cap sur Mont Saint-Jean. C'est l'heure de la vacation radio et j'ai du mal à trouver la cachette de la cabine téléphonique. J'ai autant de mal à trouver l'emplacement du col des Six Chemins. La brave paysanne questionnée sur le sujet, s'en va en maugréant je ne sais quelle malédiction dont je ne retiendrais que.... "Le col, faudrait point se moquer du monde, mon pauvre monsieur !...". Me voilà beau ! Sans autre localisation que D105, je décide d'aller jusqu'au bout de cette route ; elle finit bien quelque part ! Que les kilomètres paraissent longs quand on cherche ! Ma persévérance est enfin récompensée ; le voilà ce col des Six Chemins avec son panneau tout neuf annonçant fièrement 168 mètres !
Demi-tour. Je reviens à Mont Saint-Jean, puis file sur Montreuil-le-Chétif. Sur le vaste plateau, le vent souffle comme un beau diable et les nuages bas augurent mal l'avenir. Un providentiel petit bois de résineux très serrés apparaît sur une minuscule route voisine. J'y serais bien, abrité du vent et de la pluie fine de retour ; agréable moment de détente confortablement installé sur un épais et très élastique rembourrage d'aiguilles de pins.

Brève accalmie. Nouveau départ avec un vent favorable et pas désagréable du tout. Montreuil-le-Chétif... Bref emprunt de la D310 (beurk !), puis, de la mignonne D173.

Que la pratique du cyclotourisme est agréable sur une telle voie ! Sans difficulté majeure, le col de la Source (243m), cinquième de la journée, est inscrit au palmarès.

Maintenant je vise le BCN de Sainte-Suzanne, théoriquement à 27 km. Mais, c'est faire peu de cas de mon irrésistible aversion à l'égard des routes trop passagères. Alors, par enchaînement, défiant les logiques arithmétiques et géométriques, j'emprunte la D103 puis, la D103bis, traverse Crissé, Rouez et La Raterie pour revenir à Rouessé-Vassé d'où, par un minuscule ruban goudronné, je rejoins Erclou, puis Torcé-Viviers-en-Charnie et enfin Sainte-Suzanne. En dépit du vent de tonnerre d'ouest qui me scotche au sol, et de la longue succession de vallonnements particulièrement indigestes, je profite pleinement du moment qui passe.

Quand au hasard d'une conversation, j'évoque les mille et une petites misères faisant le lot habituel du cyclotouriste en randonnée, ma très chère épouse n'a cesse de me répéter..." tu l'as voulu....tu ne vas pas te plaindre !..."

Mais aujourd'hui, pour quelles raisons irais-je me plaindre ? N'ai-je pas passé une journée formidable ?

René CODANI N°1882

de LARDY (Essonne)


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